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désavantage de me trouver entièrement seul. À ce point de vue, Schiller avait sur moi de grands avantages. Aussi, un général plein de bonnes intentions m’a un jour assez clairement fait entendre que je devrais faire comme Schiller. Je me contentai de lui développer tous les mérites qui distinguaient Schiller, mérites que je connaissais à coup sûr mieux que lui ; mais je continuai à marcher tranquillement sur ma route, sans plus m’inquiéter du succès, et je me suis occupé de mes adversaires le moins possible. »

Le soir on exécuta des fragments de la Messiade de Hændel sous la direction d’Éberwein. Madame de Goethe, mesdemoiselles de Pogwisch, Caroline d’Égloffstein, de Froriep[1] se joignirent aux chanteuses, pour contribuer à satisfaire un vœu que Goethe formait depuis longtemps. Assis à une certaine distance, écoutant avec une attention profonde, il passa une soirée de bonheur, toute consacrée à l’admiration de cette œuvre grandiose.

Lundi, 19 avril 1824.

Le plus grand philologue de notre temps, Frédéric-Auguste Wolf, de Berlin, est ici ; il va visiter le sud de la France. Goethe a donné en son honneur un grand dîner. On s’est levé de table extrêmement gai ; Goethe, d’une humeur charmante, attaquait toujours ce que disait Wolf, et il m’a dit plus tard : « Avec Wolf, il faut absolument que je joue le rôle de Méphistophélès. C’est le

    mande, sont celles-ci : « La direction du siècle était subjective, mes efforts étaient objectifs. » J’ai tàcbé d’être plus clair ; un passage d’une page précédente m’en faisait un devoir.

  1. Fille d’un médecin distingué, mort en 1847 ; aujourd’hui institutrice à la cour.