Page:Edgar Poe Arthur Gordon Pym.djvu/167

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changement de position. Pour nous mettre en mesure de profiter, autant que possible, de la première ondée qui pouvait survenir, nous ôtâmes nos chemises afin d’en user comme nous avions fait des draps ; mais, naturellement, nous n’espérions pas par ce moyen en recueillir, même dans les circonstances les plus favorables, plus d’un huitième de pinte en une fois. Aucune apparence de nuage ne se manifesta de toute la journée, et les souffrances de la soif devinrent presque intolérables. À la nuit, Peters parvint à attraper une heure à peu près d’un sommeil agité ; quant à moi, l’intensité de mes souffrances ne me permit pas de fermer les yeux un seul instant.

5 août. — Ce jour-là, une jolie brise se leva qui nous porta à travers une masse d’algues, parmi lesquelles nous eûmes le bonheur de découvrir onze petits crabes qui nous fournirent plusieurs repas délicieux. Comme les écailles en étaient très-tendres, nous les mangeâmes tout entiers, et nous découvrîmes qu’ils irritaient notre soif beaucoup moins que les cirrhopodes. Ne voyant pas trace de requins parmi les algues, nous nous hasardâmes à nous baigner et nous restâmes dans l’eau quatre ou cinq heures, pendant lesquelles nous sentîmes une notable diminution dans notre soif. Nous en fûmes singulièrement réconfortés, et, ayant pu tous deux attraper un peu de sommeil, nous passâmes une nuit un peu moins pénible que la précédente.

6 août. — Nous fûmes ce jour-là gratifiés d’une pluie serrée et continue qui dura depuis midi environ jusqu’après la brune. Alors, nous déplorâmes amèrement la perte de notre cruche et de notre bouteille d’osier ; car,