Page:Edmond - Louis Blanc, 1882.djvu/15

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aile un de ses futurs favoris. Armand Carrel, cet inaccessible de la veille, frappé des qualités du jeune journaliste et ne le connaissant encore que de nom, lui fit demander une série de travaux pour le National. Les sujets au choix de l’écrivain.

Louis Blanc, profitant de la publication d’un ouvrage de Claudon sur le xviiie siècle, prépara une étude sur les philosophes de cette période. Il la présenta à Armand Carrel.

Les deux hommes se dévisageaient pour la première fois. Le directeur du National prit sur le champ connaissance du manuscrit. Sa figure se rembrunissait à la lecture, et, en vérité, à son point de vue, il y avait de quoi. Voltaire, traité presque en adversaire de la démocratie ; Rousseau, exalté en sa qualité d’ami du peuple ! Carrel n’essaya même pas de maîtriser son irritation.

« Voilà bien les jeunes gens d’aujourd’hui, » s’écria-t-il en jetant le manuscrit sur la table.

Et là-dessus une sortie torrentielle, plus riche peut-être en expansions qu’en arguments.

Louis Blanc fut abasourdi. Il laissa passer le flot, puis, saisissant la première reprise d’haleine chez son interlocuteur :