Page:Eekhoud - Kermesses, 1884.djvu/116

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les deuxièmes étages des hôtels de la place, et le phénix aux ailes déployées, ornant le cimier de son casque, pointait au-dessus des toits.

La géante marchait derrière. Celle-ci, plus hautaine que Druon, regardait droit devant elle, sans bouger la tête, indifférente aux interpellations de son peuple. Aussi, justement froissée, la bonne gent accueillait-elle moins cordialement la première châtelaine du Burg que le châtelain son mari.

Ensuite commença le défilé des chars et des quadrilles de cavaliers costumés. Au-dessus de ces flots moutonnants de têtes rissolées, les Navires semblaient tanguer. Les mignons matelots, tout de blanc habillés, affourchés sur les vergues, suspendus dans les haubans, arrachaient des récris d’angoisse aux mères, et, crânes, ils agitaient leurs chapeaux de toile cirée.

Et des connaisseurs, Flup tout le premier, signalaient les pièces de l’Ommegang à mesure qu’elles apparaissaient dans le lointain.

— Le char d’Anvers ! La Pucelle ! Ce cri secoua longuement la multitude comme l’ouragan agite les cimes des futaies.

C’était le dernier char et par conséquent le plus glorieux. La charpente en disparaissait sous les ors, les tentures, la jonchée. Il s’élevait, en pyramide, par gradins sur lesquels se groupaient, dans un désordre théâtral, des femmes en toilettes blanches, décolletées, les bras nus, couronnées de lauriers. Des hommes pelus, le trident à la main ; des éphèbes accoudés sur des thyrses, des trophées et des cornes d’abondance repré-