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Raymonne

Les bois et les coteaux sont couverts de rosée,
Le papillon volage et l’abeille empressée
Visitent l’aubépine et dérobent son miel.

Raymonne est une enfant par le cœur et la taille ;
Pour la grâce il n’est pas de fille qui la vaille.
Châtelaine jamais n’eut rayons si divins
Dans les yeux, sur la bouche un si charmant sourire.
Lorsqu’on la voit passer, on ne peut que redire :
« Cette ange n’était pas faite pour nos chemins. »

Huguet n’a que vingt ans. Sa carrure d’athlète
Le dispute en puissance aux lignes de sa tête,
Ses membres vigoureux cadrent avec ses traits ;
Dans ses yeux bruns la force à la bonté se mêle ;
Il a des cheveux noirs dont l’épaisseur rappelle
Les lianes ceignant les chênes des forêts.

« Sais-tu, disait le gars, qu’auprès de toi ma vie
Est un hallier obscur que perce une éclaircie !
Je serais sans espoir si je ne t’avais pas…
Mes chemins rocailleux, de fleurs qui les émaille,
Raymonne ? et, dans les champs ingrats où je travaille,
Quel charme a décuplé la force de mes bras ?