Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/105

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qu’Urbain se dirigeait d’instinct à la mer et que son grand côtre bleu à voiles rousses lui apparût toujours dans une gloire victorieuse, comme au soir de la régate.

Elle monta sur la dune, de l’autre côté de la Corbière, pour voir le large. De la brume si dense que la barque du père Crozon le homardier, mouillée à ses pieds, était effacée et aussi l’eau tout autour d’elle. On respirait une aigre salure et les cils mettaient une touche froide aux paupières en battant. La Marie-Jeanne écouta un instant les sons ouatés de la cloche, puis elle s’en retourna en longeant le cimetière. Elle vit la tombe du vieux Jean-Marie Coët accotée au mur bas. Le village, la mer, tout lui semblait un grand cimetière sous le silence définitif et le glas agonisant. Elle trembla, se hâta vers la jetée. La nuit tombait.

Devant le canot de sauvetage, on l’aborda.

— Sont-ils revenus ?

C’était la Louise inquiète qui sortait de l’usine.

— Pas encore…

Les deux femmes cheminèrent sur le granit. Le brouillard absorbait l’obscurité et se fermait comme une muraille. La mère Aquenette sonnait à son tour, le Nain n’étant pas rentré. Près d’elle, seule la femme de Perchais attendait toujours. Les autres avaient retrouvé leur mari, leur père, et maintenant mangeaient la soupe.