Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/116

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Dehors des congres séchaient sur des cordes. Il ne faisait pas froid parce qu’il ventait peu. C’était un temps gris de février, tout encotonné de brume, avec un océan de mercure qui ressaquait lourdement dans les roches. On ne voyait point de terre à l’horizon restreint. L’îlot du Pilier, qu’on embrassait d’un coup d’œil, était seul, perdu en mer ; et une petite voile se hâtait vers lui, inclinée par son élan.

Jean-Baptiste longea l’enclos du phare et descendit vers la mer. Devant lui des lapins déboulaient par petits sauts comiques. Il gagna une pointe rocheuse, parallèle à la jetée et s’y tint debout pour voir le départ des Charrier.

Il y a sur ce roc d’un kilomètre, un phare et un sémaphore, abritant quatre êtres humains sous leurs toits bas, accroupis ras la terre, dans la crainte des vents ravageurs. Ils sont séparés des autres hommes qu’ils aperçoivent au loin dans des barques ; ils n’ont même pas un solide canot pour gagner la côte la plus proche ; et durant les mois d’hiver, cernés par la tempête, ils ne voient plus rien de vivant que les mouettes aux abois sauvages qui fuient dans les bourrasques.

Mais pour rendre l’exil plus pénible, la discorde régnait entre le phare et le sémaphore. Là où il y a seulement deux hommes, il y a de la haine. Les gardiens étaient si bien fâchés à propos de gibiers