Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/143

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comme un dos de bar. Beaucoup d’oignons rouges boulaient dans le clapotis.

De terre, Piron continuait à crocheter. Autour de lui le soleil blanchissait les éboulis granitiques, qu’atteignent seules les marées d’équinoxe, et allumait le mica qui les paillette. De l’eau, croupie dans des mares goémonneuses, tournait au purin, croûtait sur les bords et dégageait une violente odeur stercorale et saumâtre, tandis qu’une multitude de crabes noirs, plats et carrés, se chauffaient sur les pierres sous lesquelles ils disparaissaient avec un menu fracas de coquilles lorsque approchaient les sabots de Jean-Baptiste.

La yole explorait la mer, sur les hauts fonds, près de l’île, où Sémelin mit à l’eau le sabot et la bougie fichée tout allumée, droit au milieu. À peine si un papillotement roux se voyait par intervalle. Sémelin récitait le Pater et l’Ave. Le sabot dérivait lentement sur la mer calme où il devait, Dieu aidant, marquer la place des morts.

Fatigué de regarder le large où croisaient les voiles multicolores des écumeurs, Gaud s’intéressa au miracle. Le sabot s’engageait entre les roches, pénétrait dans un cirque de brisants et gagnait insensiblement la côte. Un cristal de quatre ou cinq mètres d’épaisseur couvrait des sablières blondes et des pelouses où l’on distinguait la marche oblique du crabe, l’éclair des mulets en