Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/145

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montait au phare ; Gaud vit le vieux Sémelin qui ramenait la yole le long de l’île ; alors il rejoignit sa femme en courant.

Elle se détourna au bruit des galoches, parut honnêtement surprise et demanda :

— Eh ben, avez-vous trouvé un corps ?

Gaud ne répondit pas et fixa ses regards sur le visage clair de Marie. Il avait envie de la battre et de l’étreindre tout à la fois. Il aurait voulu calmer sa jalousie par des gestes de châtiment et de possession, être le maître dont la mâle puissance plie la femelle victorieusement. Elle marchait près de lui, tranquille, les mains sur ses hanches, la poitrine en avant. Et comme il fut pris, aux portes du sémaphore, d’une quinte de toux, qui secoua son maillot trop large en lui arrachant le sang des poumons, elle s’apitoya de manière blessante :

— Mon pauvre homme, tu t’es esquinté au sauvetage, va donc te r’poser !

Mais Gaud ne devait plus se reposer maintenant que l’inquiétude habitait son cœur.

Il retourna sur la jetée où Sémelin hissait la norvégienne à l’aide de la grue. Pour renouer, il s’excusa un peu longuement et s’offrit à virer le treuil. Plein de ressentiment, le bonhomme l’écarta :

— Va veiller ta femme et laisse la mer tranquille !