Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/157

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monnaie à fermoir de cuivre qui bossuait son pantalon sur la cuisse. Au bout du marais, la ville surgissait dans un éclat blanc, chaque fois qu’un nuage démasquait le soleil, puis l’ombre à nouveau rasait la plaine grise. Jean-Baptiste marchait fièrement, la casquette en arrière, les bras lancés : il allait acheter un collier pour la Gaude ! Et il avait envie de le crier aux champs, comme on proclame une victoire.

À Noirmoutier il visita les amis, et parce que les hommes ne peuvent se voir, ni causer, sans boire, il trinqua chez Beaulieu, chez Malchaussé le charpentier de la place d’Armes et chez les Goustan. Puis, tous ensemble, ils prirent « la dernière » au cabaret de la mère Cônard où Jean-Baptiste s’enferma dans une joie intérieure en songeant à cette gifle qu’il reçut de la Gaude, ici même, au temps où il avait le béret de l’État au nom glorieux de Marseillaise.

Il rentra tard par les bossis, le sang chaud, la tête légère ; et quand, à la croix de la Ménissière, il rencontra sa mère, chargée de hardes, et la Louise qui portait son petit dans un tablier, il demeura pantois de surprise.

— Ben quoi ! où donc qu’ vous allez !

— À Lépine, chez ma sœur, répondit la bonne femme ; y a pus à tenir chez nous, c’ te brute nous tuera !