Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/159

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champs. Le piétinement d’un âne le précédait obstinément sur le chemin, et le vent, qui ployait l’herbe, semblait faire ramper les talus autour de lui.

Quand il arrive à sa cabane, il est nuit close. Il pousse la porte et heurte une masse inerte qui brimballe dans le noir. Il recule, craque une allumette et voit d’abord une ombre longue osciller sur le mur, puis un corps qui pend du plafond… L’allumette brûle les doigts de Jean-Baptiste qui la lâche et ressort peureusement.

Il court au cabaret qui est un peu plus bas sur la route, et crie aux hommes qui boivent :

— L’ père qui s’a pendu ! l’ père qui s’a pendu !

On se précipite avec des chandelles dans le creux des mains ; quelqu’un balance un falot au ras du sol et des voix s’appellent dans la nuit.

A la porte de la cabane il y a un arrêt. On tend les petites lumières et on regarde. Un corps qui n’en finit plus descend du toit jusqu’à toucher deux galoches, qui luisent à terre. Louchon, le facteur, tire son couteau et, du haut d’une chaise, tranche la corde. Le vieux s’affale lourdement dans les bras du garde-champêtre qui le tâte et dit d’un air entendu :

— Ça y est ! y a pu qu’ le curé pour lui faire du bien !

On se tait. Le cadavre gît, froid, violâtre, ren-