Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/183

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d’eau. Les barriques où Sémelin nourrissait des pommiers, gisaient, éventrées parmi les roches. Le carré de légumes, l’euphorbe et le chardon bleu étaient fauchés sur la terre rase.

Mais une plus grande surprise l’attendait à l’est. Du pied du phare jusqu’à la mer une jonchée d’oiseaux matelassait le sol. Il n’en avait jamais tant vu, entassés les uns sur les autres, accrochés au littoral, aux tuiles des bâtiments et jusqu’au garde-fou de la lanterne. Les pluviers mêlés aux bernaches faisaient des taches grises sur des fonds noirs. Amaigris par la migration, ils gisaient le crâne sanglant, et beaucoup vivaient encore.

Jean-Baptiste cria, non pas tant pour manifester sa joie que pour avertir le sémaphore dont il approchait, car il lui tardait de voir la Gaude, recluse depuis l’avant-dernier soir où il s’était colleté avec son bonhomme.

L’aurore avait une fraîcheur, une gloire de renouveau qui lui fouettait le sang. Il gorgeait ses poumons d’air tonique, satisfait d’enfler son thorax ; et malgré la nuit blanche il éprouvait l’abondance de sa force musculaire dans le jeu de ses articulations. Mais rien ne bougeant au sémaphore, il se mit à chanter à tue-tête en tournant le dos et ramassant un à un les oiseaux morts.