Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/243

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— Oh ! ça presse point, mais vous savez, un mot fait toujours plaisir.

— Tiens ! le gars, c’est le gars, quoi ! Salut, Bernard !

— Salut, Louchon !

Chaque fois c’est la même réponse. Le brigadier s’efforce d’en prendre gaillardement son parti, bien qu’il sente, au fond, croître son inquiétude ; et quand la mère Bernard lui demande le soir :

— As-tu vu le facteur ?

Il ment avec fanfaronnade pour dissimuler et se donner du cœur :

— Non, mais il connaît le chemin, pas vrai ! il viendra ben quand y aura quéque chose !

Cependant il éprouvait le besoin d’échapper au bourdonnement des pensées qui tournaient en rond sous son crâne. N’ayant plus rien à faire à la maison ni au jardin, il bricola, construisit des moulins, des gendarmes qui battaient des bras au vent, ou de petits bateaux se poursuivant autour d’un axe. Intéressé par ses inutilités, il les parachevait avec conscience et les distribuait autour de lui.

En même temps, il s’adonna furieusement à la pêche et on le vit des heures entières somnoler au bord de la jetée, les jambes pendantes, encadré par Clémotte et Hourtin qui fumaient dans un silence contemplatif.

Leurs ombres s’allongeaient sur l’eau devant eux.