Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/175

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Vous avez une conscience, je suppose. Mais voici M. Lydgate, il faut que j’aille prévenir mon oncle.

— Mary, dit Fred, saisissant sa main au moment où elle se levait, si vous ne voulez pas me donner quelque encouragement, je deviendrai pire au lieu de devenir meilleur.

— Je ne vous donnerai pas d’encouragement, dit Mary en rougissant. Vos amis le blâmeraient, comme les miens. Mon père trouverait honteux que je m’engage à un homme qui fait des dettes et ne veut pas travailler.

Fred, offensé, laissa aller sa main. Elle alla vers la porte ; mais, se retournant, elle dit :

— Fred, vous avez toujours été bon et généreux pour moi. Je ne suis pas ingrate. Mais ne me parlez plus jamais ainsi.

— Très bien, dit Fred d’un ton blessé en prenant son chapeau et sa cravache, le visage rougissant et pâlissant tour à tour.

Comme d’autres jeunes gens paresseux et fainéants, il était absolument épris d’une jeune fille simple et sans fortune. Mais, avec la perspective des terres de M. Featherstone à l’arrière-plan, et la conviction que Mary, quoi qu’elle pût dire, se souciait de lui quand même, Fred n’était pas complètement désespéré.

Quand il fut rentré, il donna quatre des billets de vingt livres à sa mère, la priant de les lui garder.

Je ne veux pas dépenser cet argent-là, mère. Je veux l’employer à payer une dette. Ainsi tenez-le bien à l’abri de mes doigts.

— Dieu vous bénisse, mon chéri ! dit sa mère.

Elle raffolait de son fils aîné et de sa fille cadette, âgée de six ans, que d’autres regardaient comme ses deux plus méchants enfants. L’œil d’une mère n’est pas toujours aveugle dans sa partialité ; n’est-ce pas elle qui peut le mieux juger lequel de ses enfants est tendre et plein d’amour filial ? Et Fred aimait certainement beaucoup sa mère. Peut-