Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/225

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Le docteur Sprague, à peine entré, interpella d’un ton bourru le groupe déjà assemblé :

— Je tiens pour Farebrother, je suis tout à fait d’avis qu’il y ait un traitement pour le chapelain, mais pourquoi l’enlever au vicaire ? Il n’a rien de trop. Il lui faut assurer sa vie, tenir une maison, faire les charités qui incombent à un pasteur. Mettez-lui quarante livres dans sa bourse et vous ne lui ferez pas de mal. C’est un bon diable, ce Farebrother, et il n’a d’un ecclésiastique que juste ce qu’il en faut pour son ministère.

— Oh ! oh ! docteur ! dit le vieux M. Powderell, quincaillier retiré, et de quelque importance dans la ville ; nous vous laissons votre manière de dire ; mais ce que nous avons à envisager aujourd’hui, ce n’est pas le revenu de tel ou tel, ce sont les âmes des pauvres gens malades. Ici, la voix et le visage de M. Powderell exprimèrent une véritable émotion pathétique. C’est un vrai prédicateur de l’Évangile que M. Tyke. Je voterais contre ma conscience si je votais contre M. Tyke.

— Les adversaires de M. Tyke n’ont demandé à personne de voter contre leur conscience, je présume, dit M. Hackbutt, riche tanneur à la parole facile, dont les lunettes brillantes et les cheveux hérissés se tournaient pour le moment avec quelque sévérité vers l’innocent Powderell. Mais, à mon avis, il nous appartient à nous, directeurs, de décider s’il est bien de notre devoir de mettre en avant des propositions qui n’émanent que d’une seule personne. Parmi les membres de ce comité, y en a-t-il un seul, le croyez-vous, prêt à affirmer qu’il eût jamais conçu l’idée d’expulser un gentleman ayant toujours rempli ici les fonctions de chapelain ? — et ne faut-il pas en chercher la cause dans les insinuations de certaines gens, qui ont pris l’habitude de considérer toutes les institutions de notre ville comme des instruments à leur usage ? — Je ne blâme les