Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/332

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sentait alors le dernier mot du progrès, et il se considérait comme très heureux de pouvoir être le premier à le parcourir avec elle, s’arrêtant aux images des belles dames et des messieurs aux joues et aux sourires luisants des gravures, recommandant comme fameux des versets comiques et comme pleines d’intérêt des histoires sentimentales. Rosemonde se montrait gracieuse, et M. Ned, très satisfait, avec son menton fuyant, de ses avantages extérieurs, était tout heureux de pouvoir mettre au service de sa galanterie tout ce que l’art et la littérature offraient de plus digne de plaire à une belle jeune fille.

— Je trouve à l’honorable mistress S*** quelque ressemblance avec vous, dit M. Ned, regardant d’un air assez indifférent, d’ailleurs, le portrait dans le livre ouvert devant lui.

— Elle a un dos énorme, elle semble avoir posé pour le dos, dit Rosemonde sans aucune intention de critique, tout en remarquant combien les mains du jeune Plymdale étaient rouges et se demandant pourquoi Lydgate ne venait pas. Elle continuait, pendant cet entretien, à faire de la frivolité.

— Je n’ai pas dit qu’elle fût aussi belle que vous, reprit M. Ned, se hasardant à détacher ses yeux du portrait pour les reporter sur sa rivale.

— Je vous soupçonne d’être un habile flatteur, dit Rosemonde, intérieurement convaincue qu’elle aurait à refuser ce jeune gentleman.

À cet instant, Lydgate parut ; le livre fut fermé avant qu’il eût rejoint Rosemonde, et, tandis qu’avec aisance et d’un air de confiance assurée il s’asseyait de l’autre côté de la jeune fille, la mâchoire du jeune Plymdale s’abaissa comme un baromètre qui dégringole du côté peu réjouissant de pluie le vent. Rosemonde était heureuse autant de la présence de Lydgate que de l’effet qu’elle produisit ; elle aimait à exciter la jalousie.