Page:Eliot - Middlemarch, volume 1.djvu/367

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l’intelligence trop fière. Et vous, de votre côté, vous n’êtes pas faite pour épouser un homme pauvre.

— M. Lydgate n’est pas un homme pauvre, ma tante. Il a de très hautes relations de famille.

— Il m’a dit lui-même qu’il était pauvre.

— Cela vient de son habitude de voir des gens qui vivent sur un grand pied.

— Ma chère Rosemonde, vous ne devez pas songer à vivre sur un grand pied.

Rosemonde baissa les yeux, et se mit à jouer avec son ridicule. Ce n’était pas une jeune fille violente, et elle n’avait jamais de réponses tranchantes, mais elle avait bien l’intention de vivre comme il lui plairait.

— Ainsi, c’est donc vrai, dit mistress Bulstrode en regardant gravement sa nièce. Vous pensez à M. Lydgate ; il y a quelque chose entre vous sans que votre père le sache ! Soyez franche, ma chère Rosemonde, M. Lygdate vous a demandée en mariage ?

Rosemonde éprouvait un sentiment très pénible. Elle avait toujours été parfaitement tranquille sur le sentiment qu’elle inspirait à Lydgate et sur ses intentions mais, maintenant que sa tante lui posait la question, elle souffrait de ne pouvoir répondre : oui. Son orgueil en était blessé, mais son empire ordinaire sur elle-même lui vint en aide.

— Je vous prie de m’excuser, tante. C’est un sujet dont je préférerais ne pas parler.

— Vous ne donneriez pas votre cœur à un homme, sans la certitude de l’épouser, je veux le croire, ma chère. Et songez aux deux excellents partis que vous avez refusés, je le sais, — et il y en a un qui est encore tout à votre portée, si vous ne persistez pas à le rejeter. J’ai connu une jeune fille d’une très grande beauté qui a fini par se très mal marier, en agissant ainsi. M. Ned Plymdale est un gentil jeune homme — il y a des gens qui le trouveraient de belle mine ;