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bon prophète pour avoir quelque pressentiment de ce qui pourrait arriver à la suite de M. Joshua Rigg.



CHAPITRE III


Quand M. Vincy rentra chez lui après la lecture du testament, sa manière de voir sur différents points était bien changée. C’était un homme d’un esprit ouvert, mais habitué à se servir de la voie indirecte pour manifester ses sentiments ; quand, en affaires, un marché de soie lui avait causé quelque déception, il jurait après le groom ; quand son beau-frère Bulstrode le contrariait, il faisait des remarques acerbes sur le méthodisme ; cette fois, ce fut à la paresse de Fred qu’il s’en prit avec un soudain accroissement de sévérité.

— Eh bien, monsieur, commença-t-il quand le jeune homme se leva pour aller se coucher, j’espère que vous voilà décidé à passer votre examen à la prochaine session. Ma résolution est prise ; aussi je vous conseille de ne pas perdre de temps à prendre la vôtre.

Fred ne répondit pas. Il était trop complètement abattu. Vingt-quatre heures auparavant, il avait pensé qu’il serait sûr aujourd’hui, à pareille heure, de n’avoir plus à se préoccuper de rien faire désormais ; il se voyait chassant en costume cramoisi sur un cheval de race, allant à la battue sur une jolie bête à deux fins et jouissant du respect qui s’attache à ces avantages ; de plus, il rembourserait immédiatement M. Garth, et Mary n’aurait plus de raisons pour ne pas l’épouser. Et tout cela lui serait venu sans effort et sans travail, par une pure faveur de la Providence sous la forme d’un caprice de vieillard. Mais voilà que, mainte-