Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/104

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dans l’Église, mais ceux qui me tiennent ce langage feraient aussi bien de m’envoyer vivre dans les bois.

La voix de Fred avait pris un ton de reproche grondeur, et M. Farebrother eut été tenté de sourire, s’il n’avait eu l’esprit trop occupé à en imaginer plus que n’en avait dit Fred.

— Avez-vous quelques difficultés à propos des doctrines ? à propos des articles ? demanda-t-il, faisant effort pour ne considérer uniquement dans la question que l’intérêt de Fred.

— Non ; je suppose que les articles sont justes. Je n’aurais pas d’arguments pour les réfuter, puisque des hommes bien meilleurs et plus instruits que moi les acceptent. Je crois qu’il serait assez ridicule de ma part de montrer de semblables scrupules, comme si je pouvais en être juge.

— Je puis donc supposer que vous pensiez être à même de faire un bon petit prêtre de campagne, sans être d’ailleurs un fameux théologien ?

— Sans doute ; s’il faut que je devienne clergyman, j’essayerai de faire mon devoir tout en ne l’aimant guère. Trouvez-vous qu’on puisse m’en blâmer ?

— D’entrer dans l’Église dans de telles conditions ? Cela dépend de votre conscience, Fred. Jusqu’à quel point avez-vous mesuré l’importance de cet acte et envisagé ce que votre position exigerait de vous ? Ce que je puis vous dire de moi, c’est que je n’ai jamais été assez strict dans les devoirs de ma profession et que ma conscience s’en est trouvée mal à l’aise.

— Mais il y a encore un autre obstacle, dit Fred en rougissant ; je ne vous en ai pas encore parlé, bien que certaines choses aient pu vous le faire deviner. Il y a une personne à laquelle je suis attaché de tout mon cœur ; je l’ai aimée depuis que nous étions tout enfants.