Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/238

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que c’est de la plaisanterie et de l’ironie qu’il est revenu au sérieux ; tout le badinage de Phalya-Mani a été balayé par un flot de sentiment venu des profondeurs, si bien que nulle part la philosophie de l’Illusion n’est prise plus au tragique que dans cette Maya que les critiques citent volontiers comme l’expression la plus nette de la pensée de Leconte de Lisle.

On pourrait même citer un second trait de ce genre. Il est question de « la sainteté prodigieuse du Richi Viçvamitra,… qui se laissa manger vivant par la vermine » ; « cette vertu sans égale » est « l’objet constant des aspirations » de ce bon roi qui a oublié d’asperger les huit points du monde : l’ironie, comme on voit, est terrible. Elle n’a pas empêché Leconte de Lisle de faire la Mort de Valmiki, qui fait son apparition dans les Poèmes antiques peu après, dans l’édition de 1881.

Phalya-Mani, c’est le prolongement des chicanes antichrétiennes de qualité inférieure. Mais la haine du Dieu despotique et la révolte, telles qu’elles s’expriment dans Qaïn, auront à leur tour, leur répercussion qui sera d’une autre importance.

Leconte de Lisle, préoccupé maintenant surtout du christianisme et du judaïsme, s’habitue à voir la divinité d’après le type de ces religions. Il commence à prendre intérêt à leur religion-sœur, au mahométisme. Les poèmes sur la civilisation musulmane