Page:Elzenberg - Le Sentiment religieux chez Leconte de Lisle, 1909.djvu/248

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de Lisle demandait des « époques d’orage et des temps pacifiques » et surtout des cultes qu’ils entraînent dans leur fuite :


Rouleront-ils toujours vainement flot sur flot ?


C’est ici que, pour finir, la prépondérance du sentiment religieux chez Leconte de Lisle apparaît une fois encore en pleine lumière : nulle part le désespoir du pessimiste n’est représenté aussi clairement comme la suite de la disparition des Dieux. Si vraiment tous les Dieux n’ont été que des rêves d’un jour, et si vraiment il n’en renaîtra plus jamais, il ne reste donc qu’à appeler comme dernière consolation le néant tant de fois invoqué et que maintenant le poète entrevoit dans un avenir prochain, non seulement pour lui-même, mais pour l’humanité et le monde. Après lui avoir révélé la vérité, le Démon dit à l’Homme :


Mais, va ! Console-toi de ton œuvre insensée.
Bientôt ce vieux mirage aura fui de tes yeux,
Et tout disparaîtra, le monde et ta pensée,
Dans l’immuable Paix où sont rentrés les Dieux.