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VIERGES EN FLEUR

Jusqu’à l’aube, sonna l’éveil glorieux de sa jeunesse en fête.

Elle fut initiée à toute la joie. Elle en eut les frissons printaniers, les fraîches et primes caresses, les étreintes presque chastes des premiers rendez-vous.

Philbert, en virtuose accompli et subtil, savait qu’il faut mêler aux ivresses des corps l’ivresse plus troublante et plus forte des âmes. Il se liait aux chairs, il s’enlaçait au cœur. Il entraînait l’amie affolée et tremblante, en des essors profonds, là-haut, dans le plein ciel. La vie, sous ses baisers, se magnifiait, devenait une apothéose : l’amante et son amant étaient vraiment des dieux.

— Jeanne ! Jeanne !

— Chéri !

— Je t’aime, je t’adore !…

— Et je suis bien heureuse.

— Oui, c’est le ciel !

— Mon ciel, c’est toi !

— Ta bouche !

— Prends ! prends-la, je te la donne et garde-la toujours.

— Bouche chérie, bouche rose, bouche fraîche, je veux être noyé dans ton flot de baisers !

À l’aurore, un instant, Jeanne ferma les yeux. Elle était accablée par toutes ces liesses.