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LES ROUGON-MACQUART.

geant et embarrassant les trois rues, sortait un branle d’activité fiévreuse. Bien que l’architecte se servît des constructions existantes, il les ouvrait de toutes parts, pour les aménager ; et, au milieu, dans la trouée des cours, il bâtissait une galerie centrale, vaste comme une église, qui devait déboucher par une porte d’honneur, sur la rue Neuve-Saint-Augustin, au centre de la façade. On avait eu d’abord de grandes difficultés à établir les sous-sols, car on était tombé sur des infiltrations d’égout et sur des terres rapportées, pleines d’ossements humains. Ensuite, le forage du puits avait violemment préoccupé les maisons voisines, un puits de cent mètres, dont le débit devait être de cinq cents litres à la minute. Maintenant, les murs s’élevaient au premier étage ; des échafauds, des tours de charpentes, enfermaient l’île entière ; sans arrêt, on entendait le grincement des treuils montant les pierres de taille, le déchargement brusque des planchers de fer, la clameur de ce peuple d’ouvriers, accompagnée du bruit des pioches et des marteaux. Mais, par-dessus tout, ce qui assourdissait les gens, c’était la trépidation des machines ; tout marchait à la vapeur, des sifflements aigus déchiraient l’air ; tandis que, au moindre coup de vent, un nuage de plâtre s’envolait et s’abattait sur les toitures environnantes, ainsi qu’une tombée de neige. Les Baudu désespérés regardaient cette poussière implacable pénétrer partout, traverser les boiseries les mieux closes, salir les étoffes de la boutique, se glisser jusque dans leur lit ; et l’idée qu’ils la respiraient quand même, qu’ils finiraient par en mourir, leur empoisonnait l’existence.

Du reste, la situation allait empirer encore. En septembre, l’architecte, craignant de ne pas être prêt, se décida à faire travailler la nuit. De puissantes lampes électriques furent établies, et le branle ne cessa plus : des équipes se succédaient, les marteaux n’arrêtaient pas, les