Page:Emile Zola - L’Argent.djvu/170

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— Maintenant, tout est réglé, reprit madame Caroline. Nous allons monter à la salle de bains.

L’usage était que chaque nouveau pensionnaire, à son entrée, prenait un bain ; et les baignoires se trouvaient en haut, dans des cabinets attenant à l’infirmerie, qui elle-même, composée de deux petits dortoirs, l’un pour les garçons, l’autre pour les filles, était voisine de la lingerie. Les six sœurs de la communauté régnaient là, dans cette lingerie superbe, tout en érable verni, à trois étages de profondes armoires, dans cette infirmerie modèle, d’une clarté, d’une blancheur sans tache, gaie et propre comme la santé. Souvent aussi, les dames du conseil de surveillance venaient y passer une heure de l’après-midi, moins pour contrôler que pour donner à l’œuvre l’appui de leur dévouement.

Et, justement, la comtesse de Beauvilliers se trouvait là, avec sa fille Alice, dans la salle qui séparait les deux infirmeries. Souvent, elle l’amenait ainsi pour la distraire, en lui donnant le plaisir de la charité. Ce jour-là, Alice aidait une des sœurs à faire des tartines de confiture, pour deux petites convalescentes, à qui on avait permis de goûter.

— Ah ! dit la comtesse, à la vue de Victor qu’on venait de faire asseoir en attendant son bain, voici un nouveau. 

D’habitude, elle restait cérémonieuse à l’égard de madame Caroline, ne la saluant que d’un signe de tête, sans jamais lui adresser la parole, de crainte peut-être d’avoir à lier avec elle des relations de voisinage. Mais ce garçon que celle-ci amenait, l’air d’active bonté dont elle s’occupait de lui, la touchaient sans doute, la faisaient sortir de sa réserve. Et elles causèrent à demi-voix.

— Si vous saviez, madame, de quel enfer je viens de le tirer ! Je le recommande à votre surveillance, comme je l’ai recommandé à toutes ces dames et à tous ces messieurs. 

— Est-ce qu’il a des parents ? Est-ce que vous les connaissez ?

— Non, sa mère est morte… Il n’a plus que moi.