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LES ROUGON-MACQUART.

propos de la limande de dix sous, elles s’étaient du coup remises toutes deux avec la belle Lisa. Maintenant la poissonnière ne valait pas gros comme ça de beurre. Et elles tapaient sur les Méhudin, des filles de rien qui n’en voulaient qu’à l’argent des hommes. La vérité était que mademoiselle Saget avait laissé entendre à madame Lecœur que Florent repassait parfois une des deux sœurs à Gavard, et qu’à eux quatre, ils faisaient des parties à crever chez Baratte, bien entendu avec les pièces de cent sous du marchand de volailles. Madame Lecœur en resta dolente, les yeux jaunes de bile.

Ce matin-là, c’était à madame Quenu que la vieille fille voulait porter un coup. Elle tourna devant le comptoir ; puis, de sa voix la plus douce :

— J’ai vu monsieur Quenu hier soir, dit-elle. Ah bien ! allez, ils s’amusent, dans ce cabinet, où ils font tant de bruit.

Lisa s’était tournée du côté de la rue, l’oreille très-attentive, mais ne voulant sans doute pas écouter de face. Mademoiselle Saget fit une pause, espérant qu’on la questionnerait. Elle ajouta plus bas :

— Ils ont une femme avec eux… Oh ! pas monsieur Quenu, je ne dis pas ça, je ne sais pas…

— C’est Clémence, interrompit la Sarriette, une grande sèche, qui fait la dinde, parce qu’elle est allée en pension. Elle vit avec un professeur râpé… Je les ai vus ensemble ; ils ont toujours l’air de se conduire au poste.

— Je sais, je sais, reprit la vieille, qui connaissait son Charvet et sa Clémence à merveille, et qui parlait uniquement pour inquiéter la charcutière.

Celle-ci ne bronchait pas. Elle avait l’air de regarder quelque chose de très-intéressant, dans les Halles. Alors, l’autre employa les grands moyens. Elle s’adressa à madame Lecœur :