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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

un vase de cuivre damasquiné et niellé, du plus beau style persan, une antiquité du temps des croisades, qui a servi au baptême de tous nos rois.

— Vous avez vu les honneurs ? demanda M. Bouchard à Du Poizat.

— Oui, répondit celui-ci. C’est madame de Llorentz qui portait le chrémeau.

Il dut donner des détails. Le chrémeau était le bonnet de baptême. Ni l’un ni l’autre de ces messieurs ne savaient cela ; ils se récrièrent. Du Poizat énuméra alors les honneurs du prince impérial, le chrémeau, le cierge, la salière, et les honneurs du parrain et de la marraine, le bassin, l’aiguière, la serviette ; tous ces objets étaient portés par des dames du palais. Et il y avait encore le manteau du petit prince, un manteau superbe, extraordinaire, étalé près des fonts, sur un fauteuil.

— Comment ! il n’y a pas une toute petite place ? s’écria madame Correur, à laquelle ces détails donnaient une fièvre de curiosité.

Alors, ils lui citèrent tous les grands corps, toutes les autorités, toutes les délégations qu’ils avaient vus passer. C’était un défilé interminable : le Corps diplomatique, le Sénat, le Corps législatif, le Conseil d’État, la Cour de cassation, la Cour des comptes, la Cour impériale, les Tribunaux de commerce et de première instance, sans compter les ministres, les préfets, les maires et leurs adjoints, les académiciens, les officiers supérieurs, jusqu’à des délégués du consistoire israélite et du consistoire protestant. Et il y en avait encore, et il y en avait toujours.

— Mon Dieu ! que ça doit être beau ! laissa échapper madame Correur avec un soupir.

Du Poizat haussa les épaules. Il était d’une humeur détestable. Tout ce monde « l’embêtait ». Et il semblait