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VIII


Des semaines se passèrent. Rougon avait repris sa vie de lassitude et d’ennui. Jamais il ne faisait allusion à l’ordre que l’empereur lui avait donné de rester à Paris. Il parlait seulement de son échec, des prétendus obstacles qui s’opposaient à son défrichement d’un coin des Landes ; et, sur ce sujet, il ne tarissait pas. Quels pouvaient être ces obstacles ? Lui, n’en voyait aucun. Il allait jusqu’à s’emporter contre l’empereur, dont il était impossible, disait-il, de tirer une explication quelconque. Peut-être Sa Majesté avait-elle craint d’être obligée de subventionner l’affaire ?

Cependant, à mesure que les jours coulaient, Clorinde multipliait ses visites rue Marbeuf. Chaque après-midi, elle semblait attendre de Rougon quelque nouvelle, elle le regardait d’un air de surprise, en le voyant rester muet. Depuis son séjour à Compiègne, elle vivait dans l’espoir d’un brusque triomphe ; elle avait imaginé tout un drame, une colère furieuse de l’empereur, une chute retentissante de M. de Marsy, une rentrée immédiate du grand homme au pouvoir. Ce plan de femme lui semblait d’un succès certain. Aussi, au bout d’un mois, son étonnement fut-il immense, lorsqu’elle vit le comte rester au ministère. Et elle conçut un dédain pour l’empereur, qui ne savait pas se venger. Elle, à sa