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UNE PAGE D’AMOUR.

— Ah ! non, par exemple ! disait-elle. On fera la noce à notre retour.

On oubliait Jeanne. Elle examinait fixement sa mère et le docteur. Certes, maintenant, Hélène acceptait ce voyage, qui devait la rapprocher d’Henri. C’était une grande joie : s’en aller tous les deux au pays du soleil, vivre les journées côte à côte, profiter des heures libres. Un rire de soulagement montait à ses lèvres, elle avait eu si peur de le perdre, elle était si heureuse de pouvoir partir avec tous ses amours ! Et, pendant que Juliette déroulait les contrées qu’ils traverseraient, tous les deux croyaient déjà marcher dans un printemps idéal, se disaient d’un regard qu’ils s’aimeraient là, et là encore, partout où ils passeraient ensemble.

Cependant, M. Rambaud, qu’une tristesse avait peu à peu rendu silencieux, s’aperçut du malaise de Jeanne.

— Est-ce que tu n’es pas bien, ma chérie ? demanda-t-il à mi-voix.

— Oh ! non, j’ai trop de mal… Remonte-moi, je t’en supplie.

— Mais il faut prévenir ta mère.

— Non, non, maman est occupée, elle n’a pas le temps… Remonte-moi, remonte-moi.

Il la prit dans ses bras, il dit à Hélène que l’enfant se sentait un peu fatiguée. Alors, elle le pria de l’attendre en haut, elle les suivait. La petite, quoique bien légère, lui glissait des mains, et il dut s’arrêter au second étage. Elle avait appuyé la tête à son épaule, tous deux se regardaient avec beaucoup de chagrin. Pas un bruit ne troublait le silence glacé de l’escalier. Il murmura :

— Tu es contente, n’est-ce pas, d’aller en Italie ?