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Page:Emilio Salgari Le tigre de Montpracem 1925.djvu/8

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Le Tigre de Montpracem


CHAPITRE PREMIER

LES PIRATES DE MONTPRACEM


On était en décembre. Un ouragan d’une violence extraordinaire s’était déchaîné, pendant la nuit, sur Montpracem, île sauvage, de sinistre renom, nid de pirates formidables, située dans la mer de Malaisie, à quelques centaines de milles des côtes de Bornéo.

Dans le ciel, poussés par un vent irrésistible, des masses de nuages noirs d’où s’échappaient, de temps en temps, de violentes averses inondant les forêts profondes de l’île, couraient comme des chevaux emportés en se mêlant en un chaos inexprimable. Sur la mer démontée, d’énormes vagues se heurtaient, se brisaient furieusement, confondant leurs mugissements avec les éclats tantôt brefs et rapides et tantôt interminables du tonnerre.

On n’apercevait aucune lumière, ni aux cabanes alignées au fond de la baie de l’île, ni sur les remparts qui la défendaient, ni sur les nombreux navires ancrés au delà des récifs, ni dans la forêt, ni sur la mer tumultueuse. Pourtant, quelqu’un venant de l’Orient aurait aperçu, en regardant en haut, sur la cime d’un rocher élevé surplombant la mer, deux points lumineux, deux fenêtres vivement éclairées.

Qui donc pouvait veiller ainsi, à cette heure, au milieu d’un pareil ouragan, dans l’île des pirates sanguinaires ?

Une cabane vaste et solide s’élevait au milieu d’un dédale de tranchées défoncées, de terrasses éboulées, de palissades arrachées, de gabions éventrés près desquels