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deux cents colonnes et de plus de douze cents figures d’hommes et d’animaux.

PERSIENNE, s. f. Nom qu’on donne à des sortes de jalousies faites de châssis, qui se composent d’un assemblage de lattes ou tringles de bois plates et minces, qui sont abat-jour. Probablement cette manière de se garantir du soleil et de se procurer, sans être vu, la facilité de voir en dehors, sera une invention de la Perse, et aura pris le nom du pays qui la mit en usage.

PERSIQUE (Statue). On donne cette épithète à des statues viriles que l’on emploie, ainsi que les statues féminines, appelées caryatides, à supporter, en place de colonnes, les plates-bandes ou les entablemens des édifices.

Cependant les mots d’atlantes et de télamons, d’après leur étymologie seule, conviennent mieux à toute figure employée dans la décoration, soit à soutenir réellement, soit à paroître porter toutes les sortes d’objets, de formes ou de fardeaux que l’imagination de l’architecte et le goût de l’ornement lui imposent. Le nom de caryatide étant reçu, à cet égard, dans le langage ordinaire, et s’appliquant aussi plus volontiers aux statues on figures féminines, il nous semble que celui d’atlantes ou de télamons devroit appartenir, pour les distinguer, aux statues ou figures viriles.

Nous avons, à l’article Caryatides (voyez ce mot), embrassé l’universalité des notions, des exemples, des usages et des documens applicables à ce genre de supports, et nous y avons rapporté l’histoire des statues persiques (voyez Caryatide). Nous n’en redirons rien ici, et nous ne releverons pas de nouveau les erreurs auxquelles ont donné lieu, à cet égard, plusieurs statues antiques mal observées.

Persique (Ordre). On trouve dans plus d’un dictionnaire ces deux mots joints ensemble, comme nous avons fait voir que l’on avoit aussi imaginé un ordre caryatide. Toutes ces vaines dénominations proviennent de la méprise de ceux qui font consister l’ordre, non pas seulement dans la fonction matérielle de la colonne comme support, mais encore dans une de sas parties isolées telle que le chapiteau, ou telle que son fût, au lieu d’entendre par ordre, un système complet de formes, de proportions et d’ornemens mis en rapport dans un édifice, avec telle ou telle qualité, telle ou telle expression. Nous dirons donc qu’il n’y pas plus d’ordre persique que d’ordre caryatide.

PERSPECTIVE, s. f. La perspective linéaire, qu’on distingue de la perspective aérienne, est la seule qui soit du ressort de l’architecture.

Comme science, la perspective linéaire fait partie des mathématiques, et comme telle elle est soumise à des principes rigoureusement démontrés. Elle enseigne de quelle manière les lignes qui circonscrivent les objets, se présentent à l’œil du spectateur, suivant le point où l’œil est placé, et selon la distance de ces objets.

C’est fort injustement qu’on a prétendu que la science de la perspective avoit manqué aux Anciens. Ce qui a particulièrement accrédité cette erreur, est l’évidente violation des règles et des plus simples élémens, non pas même de la science, mais de toute apparence de la perspective, dans une multitude de bas-reliefs, et surtout dans ceux de la colonne Trajane, où il eût été impossible, et même déraisonnable de la mettre en pratique, quand la nature des choses ne s’y seroit pas opposée. (Voy. ce qui a été développé sur ce point à l’article Bas-reliefs. ) On s’est fondé encore sur l’ignorance de la plupart des décorateurs qui ont peint des arabesque a Herculanum et à Pompéii, où toutefois il se trouve certains sujets d’architecture qui pourroient déposer du contraire. Ce qu’on doit dire, à cet égard, c’est que beaucoup de peintres aujourd’hui même ignorent les procédés de la perspective linéaire, et qu’il y a un certain art d’en tracer les lignes par sentiment, à vue d’œil, plutôt que par principe et d’après les règles. Or, nous pensons que beaucoup de peintres dans l’antiquité se sont contentés de cet à peu près. Et c’est bien ce qu’il faut croire de tous ces peintres de décors qui, sur les enduits des murs et des intérieurs de maisons à Pompéii, tracèrent et colorèrent toutes les fantaisies du genre arabesque. Ces exemples d’ignorance pratique ne prouvent point que les Anciens aient méconnu les règles de laperspective et aient omis de s’y soumettre, dans les ouvrages plus importans, surtout dans les décorations de leurs théâtres, qui en exigeoient une sévère observance.

La vérité est que les Anciens pratiquoient avec beaucoup de succès l’art de peindre sur les murs des perspectives d’architecture, comme les Modernes l’ont fait, et qu’il est impossible de supposer que dans des emplacement tels que ceux des théâtres où ces perspectives avoient pour juges les yeux de la multitude, on y eût commis de ces erreurs qui auroient frappé les plus ignorans : car s’il faut du savoir pour tracer avec justesse les lignes de l’architecture feinte, il suffit de l’instinct pour être révolté de ses erreurs. Au théâtre de Claudius Pulcher, on vit une décoration peinte et exécutée avec tant de vérité et une telle illusion, que, selon Pline, les corbeaux, trompés par l’imitation des toitures et des tuiles, venoient s’y abatre pour s’y reposer. On sait ce qu’il faut penser de ces effets d’illusion sur les animaux. Quels qu’ils puissent être, il ne faut voir dans de tels récits, que l’expression, peut-être figurée, de la perfection du moyen imitateur.

Mais à quoi servent ces autorités, et d’autres exemples semblables rapportés par les écrivains,

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