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tre sans être obligées de retourner en arrière, elles trouvent, pour sortir, une porte différente et opposée à la première. L’ouverture du puits est si spacieuse, que la lumière du jour s’y répand jusqu’au fond, de manière que les pentes ou escaliers adossés au mur, bâti circulairement, reçoivent un jour suffisant des fenêtres pratiquées dans tout sa hauteur. Ce grand et bel ouvrage ne fut pas complétement achevé sous Clément VII. Il restoit à terminer ce que nous appelons la mardelle, et les Italiens la bocca. Elle le fut sons Paul III, mais par un autre architecte, et d’après un autre dessin que celui de Sangallo.

Bossrand sait mention d’un puits semblable au château de Chambord. Ce sera probablement une imitation de celui d’Orviette ; car Chambord ne fut construit que long-temps après cette époque. Il y en a un du même genre à Turin.

Si la variété des talens d’Antoine Sangallo se prêtoit aux inventions les plus diverses, son activité, égale à son génie, lui donnoit les moyens de suffire à toutes. On a remarqué qu’il conduisoit à la sois des travaux dans cinq villes, savoir, les ouvrages de sortification à Ancône, de semblables à Florence, l’entreprise de la restauration dont on a parlé à Lorette ; à Rome, les travaux du Vatican et la construction du puits d’Orviette.

L’an 1536, cet enchaînement, inconnu aux hommes, de causes et d’effets qui leur semblent extraordinaires, et qu’ils appellent les jeux de la fortune, ramena l’empereur Charles-Quint triomphant de Tunis, et comme protecteur de la chrétienté, dans cette métropole du monde chrétien, que ses armées, neus ans auparavant, avoient traitée plus cruellement quen’auroient pu le faire les infidèles. Rome célébra son entrée par des fêtes magnifiques, et ce fut Antoine Sangallo qui fut chargé d’en faire et d’en diriger les décorations.

Il éleva sur la place de Venise, vis-à-vis le palais de Saint-Marc, un arc de triomphe, décoré, sur chacune de ses deux grandes saces, par quatre colonnes corinthiennes, qui supportoient un entablement saisant ressaut sur chacune d’elles. Entre les Colonnes étoient peints des bas-reliefs, représentant les plus belles actions de l’Empereur. Dans le haut, s’élevoient les statues des princes de la maison d’Autriche. Aux quatre angles étoient des figures de captifs. D’après les descriptions qui s’en sont conservées, ce monument temporaire offroit tous les détails et tous les ornemens réunis des plus beaux arcs antiques ; et le décorateur, libre d’employer les couleurs, pour donner, avec peu de frais, à chaque partie, l’apparence des plus beaux marbres et des métaux les plus précieux, en avoit fait un spectacle de Variétés, de richesses et de luxe, auquel la réalité de l’architecture ne sauroit jamais atteindre. Nonobstaut cet avantage, qui est le privilége de l’architecture feinte, on jugea que si le monu-


ment eût pu être exécuté avec les matériaux et les moyens ordinaires de l’art, on l’eût compté parmi ses chefs-d’œuvre. Mais il eut le sort des ouvrages de ce genre. Destiné à briller un moment, sa durée ne fut que de quelques jours, et il disparut avec les circonstances qui l’avoient fait naître.

Il n’appartient qu’à l’art de la gravure, de perpétuer les ouvrages de décoration, auxquels donnent lieu les fêtes publiques ; et les arts pourroient gagner plus qu’on ne pense à la conservation de ces productions éphémères de leur nature. D’abord, ce seroit un moyen de conserver de beaux exemples et d’utiles leçons, à ceux qui se trouvent chargés de semblables travaux ; mais on doit dire ensuite que l’histoire du goût et du génie des architectes, y trouveroit les meilleurs renseignemens. C’est, en effet, dans ces sortes d’inventions, que, libre de toutes les entraves de l’économie, qui restreint et tronque si souvent les plus beaux projets, l’imagination de l’artiste prend sans crainte tout son essor, et développe toutes ses richesses. Mais alors la gravure n’avoit pas encore pris son extension, et ne pouvoit point suppléer à l’insuffisance de l’histoire.

Un reproche qu’on est en droit de faire aux siècles qui ont suivi Sangallo, c’est d’avoir laissé à Rome, sans le terminer, un monument à peu près du même genre, mais réel, et de la construction la plus solide. Je parle de la porte dite di San-Spirito, qui termine la grande et belle rue de la Longara. Elle est construite en superbe pierre travertine, et arec une solidité qui ajoute au caractère énergique de son architecture. Vasari nous apprend qu’après la mort d’Antoine Sangallo, qui ne termina point cet ouvrage, l’envie, non-seulement s’opposa à son achèvement, mais essaya même d’en obtenir la démolition. Heureusement ces tentatives n’eurent aucun succès ; mais il est resté, jusqu’à nos jours, dans le même état d’imperfection. Une dépense légère suffiroit pour en compléter l’ensemble, et donner à l’architecture un des plus beaux modèles de porte qu’il y ait.

Antoine Sangallo construisit pour lui-même, dans la rue Grulia, un très-beau palais, qui depuis appartint au cardinal Riccio, et fut ensuite acquis et agrandi par la famille Sachetti, dont il a porté le nom jusqu’à nos jours. Sa façade se compose de deux étages, entre lesquels est pratiqué un plus petit (ou mezzanino). Chaque étage a sept fenêtres de sace ; au rez-de-chaussée, la porte occupe la place de la fenêtre du milieu. Les chambrantes des senêtres de ce rez-de-chaussée ont leur encadrement un peu trop chargé de profils, les consoles en sont lourdes et ont trop de saillie. Même observation relativement à la porte. L’ouverture des fenêtres du premier étage est un peu pyramidale. L’antiquité en offre des exemples, et Antoine Sangallo l’a