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de tumulus. On en trouve sur les bords du Dniester, et sur ceux du Danube près de Constantinople. Il est fort probable que les voyageurs, dont l’attention sera éveillée par tous ces faits, découvriront de ces sortes de sépultures sur les côtes de la Thrace, dans le Péloponèse, et surtout dans l’Asie-Mineure, où elles doivent être encore plus multipliées.

Déjà, depuis plusieurs années, quelques personnes instruites ont profité de leur séjour à Smyrne, et dans les environs de Sardes, pour rechercher les monumens de cette espèce, désignés par Hérodote et Pausanias, et que leur volume avoit dû défendre coutre la destruction. Plusieurs, en effet, se retrouvent encore aux lieux où ces auteurs les placent. Il paroît assez vraisemblable que c’est le monument de Tantale qu’on voit aux environs de Smyrne, vers le mont Sipylus.

Ce grand tumulus étoit, comme on le dira plus bas, assis sur un soubassement formé de grosses pierres. Il a, dit M. Cousinery, de qui on tient ces détails, deux cents pas de diamètre, et il est couvert de très-vieux oliviers et d’arbres fruitiers. Le propriétaire du terrain le fit ouvrir pour enlever les pierres du soubassement, et s’en servit à construire une métairie ; mais quoi-qu’elle fût assez considérable, on n’employa pas la trentième partie des pierres qui forment cette base immense, coupée par plusieurs galeries, et contenant un grand nombre de chambres. Au centre, on trouva les débris d’un bûcher placé sur le sol naturel.

On a découvert on autre tumulus à trois lieues de Smyrne, sur le chemin de Colophon ; mais c’est surtout dans les environs de Sardes qu’on rencontre un nombre prodigieux de ces monumens. On en remarque sur toutes les avenues qui y conduisent. A une lieue et demie au nord-est de la ville, au-delà de l’Hermus, s’élève une montagne dont la surface est couverte de ces monticules factices, et qu’on appelle les mille tombeaux. Cet emplacement, selon Chandler, étoit consacré aux sépultures des rois de Lydie, et des habitans les plus distingués. L’on reconnoît encore facilement le tombeau d’Alyates, père de Crésus ; il est beaucoup plus grand que tous les autres, et offre les mêmes dimensions qui lui sont données par Hérodote. Nous parlerons plus bas de ce célèbre tumulus, désigné par les mots grecs qui signifient monceau de terre.

Il y a très-peu de villes de l’Asie-Mineure qui ne conservent ainsi quelques sépultures de leurs fondateurs et de leurs anciens souverains. Il étoit de la nature de ces monumens, sans art et la plupart sans luxe, de résister à tous les agens destructeurs, beaucoup plus que n’ont pu le faire les plus somptneux ouvrages de l’architecture, dont la richesse a provoqué leur ruine, et


qui ont presque tous disparu des lieux qu’ils occupèrent avec tant d’éclat.

Les plus anciennes de ces sépultures sont aussi les plus simples. Ce sont des cônes de terre élevés avec assez d’art, sur la place même qu’avoit occupée le bûcher où le mort fut consumé, et qui contiennent ses restes. Tels sont les tumulus qu’on retrouve sur le rivage de l’Hellespont, et auxquels, comme on le dira, sont attachés des noms célèbres. Tels sont encore la plupart de ceux qui ont été déjà reconnus dans la Thrace et dans le Péloponèse. Mais il paroît que les grands et les riches, tout en conservant dans leurs sépultures la coutume ancienne et la forme primitive, y avoient ajouté des constructions dispendieuses. Elles consistèrent dans de grands soubassemens solidement construits en pierre, et aussi dans une voûte pratiquée sous l’amas de terre, avec des conduits souterrains. On citera aussi quelques exemples de plantations qui ornèrent les pentes de la montagne.

Aux environs de Pergame, on voit des tombeaux ainsi creusés et voûtés dans leur masse inférieure. Il y en a un entouré d’un profond et large fossé, destiné sans doute à en interdire l’approche. Sa masse se divise en deux sommets bien distincts : particularité dont on ne connoît pas d’autre exemple, mais qui paroît devoir indiquer que le double tumulus appartient à deux morts, et que leurs cendres furent placées dans deux caveaux séparés.

Un autre, tout voisin de ce dernier, n’a qu’un sommet. La masse de terre pyramidale qui en fait le corps, s’élève sur un mur circulaire d’environ quinze pieds de haut, et qui paroît avoir été revêtu de marbre. Ce soubassement a une porte donnant entrée dans une galerie qu’unes autre galerie coupe à angle droit. Au centre étoit une voûte dont la clef s’est affaissée. A chaque extrémité des galeries sont de petites salles carrées, où probablement avoient été placés les restes des personnages pour lesquels le monument fut élevé. Pausanias nous apprend, l. 8, ch. 4, qu’on montroit encore de son temps à Pergame, sur le Caicus, la sépulture d’Augé. C’est, dit-il, un tombeau de terre avec une base circulaire en pierre. Il y a sur ce monument une figure de femme nue faite en bronze.

Depuis long-temps, plus d’un voyageur avoit reconnu, au pied du cap Sigée, deux monticules ou masses coniques, évidemment formées de terres amoncelées, et en tout semblables à ceux dont on vient de parler. Le plus rapproché du cap est le plus considérable et le plus élevé. On le prit d’abord pour le tombeau d’Achille, et on lui en donna le nom ; mais M. de Choiseul l’ayant fait ouvrir, et ayant percé jusqu’à son centre, il fallut se désabuser, par l’inspection des objets qu’on y trouva renfermés, et dont aucun ne pouvoit se supposer avoir dû