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lorsqu’en marchant dessus, on s’apperçoit qu’il en sort de l’eau ; ce qui lui a fait donner le nom de sable bouillant.

En général, le meilleur sable est celui qui est net & point terreux ; ce qui se connoît de plusieurs manières. La première, lorsqu’en le frottant dans les mains, on sent une rudesse qui fait du bruit, & qu’il n’en reste aucune partie terreuse dans les doigts. La seconde, lorsqu’après en avoir jeté un peu dans un vase plein d’eau claire & l’avoir brouillé, si l’eau en est peu troublée, c’est une marque de sa bonté.

On le connoît encore, lorsqu’après en avoir étendu sur de l’étoffe blanche ou sur du linge, on s’apperçoit qu’après l’avoir secoué, il ne reste aucune partie terreuse attachée dessus.

Du ciment.

Le ciment n’est autre chose, dit Vitruve, que de la brique ou de la tuile concassée, ; mais cette dernière est plus dure & préférable. A son défaut, on se sert de la première, qui, étant moins cuite, plus tendre & moins terreuse, est beaucoup moins capable de résister au fardeau.

Le ciment ayant retenu après sa cuisson la causticité des sels de la glaise, dont il tire son origine, est bien plus propre à faire de bon mortier que le sable. Sa dureté le rend aussi capable de résister aux plus grands fardeaux, ayant reçu différentes formes par sa pulvérisation.

La multiplicité de ses angles fait qu’il peut mieux s’encastrer dans les inégalités des pierres qu’il doit lier, étant joint avec la chaux dont il soutient l’action par ses sels, & qui, l’ayant environné, lui communique les siens ; de façon que les uns & les autres s’animant par leur onctuosité mutuelle, s’insinuent dans les pores de la pierre, & s’y incorporent si intimement qu’ils coopèrent de concert à recueillir, & à exciter les sels des différens minéraux auquels ils sont joints : de manière qu’un mortier fait de l’un & de l’autre, est capable, même dans l’eau, de rendre la construction immuable.

De la pozzolane, & des différentes poudres qui servent aux mêmes usages.

La pozzolane, qui tire son nom de la ville de Pouzzoles, en Italie, si fameuse par ses grottes & ses eaux minérales, se trouve dans le territoire de cette ville, au pays de Bayes, & aux environs du Mont-Vésuve ; c’est une espèce de poudre rougeâtre, admirable par sa vertu.

Lorsqu’on la mêle avec la chaux, elle joint si fortement les pierres ensemble, fait corps, & s’endurcit tellement au fond même de la mer, qu’il est impossible de les désunir.

Ceux qui en ont cherché la raison, dit Vitruve, ont remarqué que dans ces montagnes & dans tous ces environs, il s’y trouve une quantité de fontaines bouillantes, qu’on a cru ne pouvoir venir que d’un feu souterrain, de soufre, de bitume & d’alun, & que la vapeur de ce feu traversant les veines de la terre, la rend non-seulement plus légère, mais encore lui donne une aridité capable d’attirer l’humidité.

C’est pourquoi lorsque l’on joint, par le moyen de l’eau, ces trois choses qui sont engendrées par le feu, elles s’endurcissent si promptement & font un corps si ferme, que rien ne peut le rompre ni dissoudre.

La comparaison qu’en donne M. Bélidor, est que la tuile étant une composition de terre, qui n’a de vertu pour agir avec la chaux, qu’après sa cuisson & après avoir été concassée & réduite en poudre : de même aussi la terre bitumineuse qui se trouve aux environs de Naples, étant brûlée par les feux souterrains, les petites parties qui en résultent & que l’on peut considérer comme une cendre, composent la poudre de pozzolane, qui doit par conséquent participer des propriétés du ciment. D’ailleurs, la nature du terrain & les effets du feu, peuvent y avoir aussi beaucoup de part.

Vitruve remarque que, dans la Toscane & sur le territoire du Mont-Apennin, il n’y a presque point de sable de cave ; qu’en Achaïe, vers la mer Adriatique, il ne s’en trouve point du tout ; & qu’en Asie au-delà de la mer, on n’en a jamais entendu parler. De sorte que, dans les lieux où il y a des fontaines bouillantes, il est très-rare qu’il ne s’y fasse de cette poudre, d’une manière ou d’une autre ; car dans les endroits où il n’y a que des montagnes & des rochers, le feu ne laisse pas que de les pénétrer, d’en consumer le plus tendre, & de n’y laisser que l’âpreté.

C’est pour cette raison que la terre brûlée aux environs de Naples, se change en cette poudre.

Celle de Toscane se change en une autre à peu près semblable, que Vitruve appelle carbunculus, & l’une & l’autre sont excellentes pour la maçonnerie ; mais la première est préférée pour les ouvrages qui se font dans l’eau ; & l’autre plus tendre que le tuf, & plus dure que le sable ordinaire, est réservée pour les édifices hors de l’eau.

On voit aux environs de Cologne, & près du bas-Rhin, en Allemagne, une espèce de poudre grise, que l’on nomme terrasse de Hollande, faite d’une terre qui se cuit comme le plâtre, que l’on écrase & que l’on réduit en poudre avec des meules de moulin.

Il est assez rare qu’elle soit pure & point falsifiée ; mais quand on en peut avoir, elle est excellente pour les ouvrages qui sont dans l’eau, résiste également à l’humidité, à la sécheresse, & à toutes les rigueurs des différentes saisons : elle unit si fortement les pierres ensemble, qu’on l’emploie en France & aux Pays-Bas, pour la construction des édifices aquatiques, au défaut de pozzolane, par la difficulté que l’on a d’en avoir à juste prix.

On se sert encore dans le même pays, au lieu de terrasse de Hollande, d’une poudre nommée cendrée