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ramides d’Egypte ; leur bâse large & leur sommet aigu représentent assez bien la figure qu’affecte la flamme en s’élevant, & c’est à cette figure qu’elles doivent leur nom.

Les régles classiques de la peinture assujettissent à cette même figure la composition des tableaux d’histoirc, soit dans son ensemble, soit dans chaque grouppe en particulier. On veut qu’elle ait beaucoup plus de bâse que de pointe ; on prononce que la forme droite ou circulaire seroit un effet monstrucux dans un tableau. S’il faut admettre cette règle comme une loi inviolable, il faut aussi condamner, comme des tableaux monstrueux, de tres-beaux ouvrages de Raphael, un grand nombre de ceux du Poussin, & surtout ses fameux tableaux des sacremens.

La célèbre peinture antique de la nôce Aldobrandine, celles qui ont été découvertes dans les fouilles d’Herculanum, les écrits de Pausanias & de Pline, ne prouvent pas que les Grecs aient connu le principe de la pyramide pittoresque. Aussi les grands partisans de toutes nos petltes conventions n’hésitent-ils pas à prononcer que les peintres des beaux siècles de la Grece, malgré toutes les beautés qu’ils devoient réunir & qui n’étoient pas apparamment moins sublimcs dans leurs ouvrages que dans ceux des statuaires, étoient fort inférieurs à nos peintres modernes. Par ce méme principe, Antoine Coypel, le grand pyramideur, doit avoir la supériorité sur le Poussin & méme sur Raphaël.

On a bien voulu dispenser de la figure py-


ramidale les compositions des peintres de bambochades & de fujets pris dans la vie commune. Il semble que, pour les dédommager de l’infériorité de leur genre, on ai consenti à leur permettre de n’imiter que la nature.

Il a bien faliu accorder la même dispense aux peintres de vues & de paysages, parce que dans ces genres, il est trop rigoureusement démontré que la vérité s’accorde rarement avec la règle des pyramides. (L)


PYRAMIDER. (v. neutre.) On dit, cette composition, ce grouppe, pyramide bien. On peut dire aussi. « Les peintres qui se sont fait un nom depuis la dégénération de l’art, entendent bien mieux que les plus grands maîtres, l’art de faire pyramider. » On peut dire encore : « il seroit difficile de citer des peintres qui aient mieux entendu qu’Antoine Coypel à faire pyramider leurs compositions. » Et l’on pourroit ajouter : « si la règle de faire pyramider leurs compositions pittoresques est un des grands principes de l’art, il n’est aucun maître qui mérite mieux d’être consulté que Coypel pour cette partie capitale ; & si l’on avoue qu’il est celui de tous les maîtres qui ait le mieux connu & le mieux pratiqué cette partie si importante, on doit convenir aussi qu’il est le plus grand maître qui ait paru depuis la renaissance de la peinture, & que surtout il est bien supérieur à Raphaël & aux artistes contemporains de ce peintre ». (L)