Page:Encyclopédie méthodique - Economie politique, T01.djvu/374

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commerce, qu’à chercher à nuire directement à celui des autres. Elles doivent même le favoriser, parce que le commerce réciproque des nations se soutient mutuellement par les richesses des vendeurs & des acheteurs.

XIV. Dans le commerce réciproque, les nations qui vendent les marchandises les plus nécessaires ou les plus utiles , ont l’avantage fur celles qui vendent les marchandises de luxe. Une nation qui est assurée’ par ses biens-fonds d’un commerce de denrées de son crû, & par conséquent aussi d’un commerce intérieur de marchandises de main - d’oeuvre , est indépendante des autres -nations. Elle ne commerce avec celks-ci que pour entretenir , faciliter & étendre son commerce extérieur, & elle doit, autant qu’il est possible,pour conserver son indépendance 8c son avantage dans Je commerce réciproque , ne tirer d’elles que des marchandises de luxé, 8c leur vendre des marchandises nécessaires aux besoins de la vie. ’ Elles croiront que par la valeur réelle de ces différentes marchandises, ce-commerce réciproque leur est plus favorable. Mais l’avantage est toujours -pour la nation , qui vend ks marchandi sesles plus" utiles & les plus nécessaires. Car alors-son commerce est établi fur k besoin des autres ; elle ne leur vend que son superflu , & ses achats ne portent que fur son opulence. Ceux- là ont plus d’intérêt de lui vendre,. qu’elle n’a besoin d’acheter ; & elle peut plus facilement sc retrancher fur le luxe, que les autres ne peuvent épargner fur k nécessaire. - II faut même remarquer que les états qui se livrentaux manufactures de luxe , éprouvent des vicissitudes fâcheuses ; car lorsque les temps sont malheureux, lecommercede luxe languit, & Jes ouvriers sc. trouvent. fans pain & fans emploi. -. La France pourroit, le commerce étant libre, produire abondamment les denrées de prer mier ; besoin., qui pourrôient suffire.à une grande ’ consommation & à un grand commerce extérieur, & qui pourraient soutenir - dans le royaume, un grand commerce réciproque avec l’étranger. - D’ailleurs, elk .ne doit, pas prétendre pleine- "nieïit à un commerce général. Elle doit eh sacrifier c.uelqnes- branches les moins importantes à l’avantage des autres parties j qui lui font-les plus profitables, & qui augmenteraient & assureraient les revenus des biens - fonds du royaume. Cependant tout commerce doit être libre, parce qu’il est de l’intérêt des marchands de s’attacher aux branches du commerce extérieur les plus sûres & ks plus profitables. 11 sussit au gouvernement de veiller à l’accroissement des revenus des biens du royaume, de ne point gêner l’indus-’ trie, de laisser aux citoyens Ja faculté 8c k choix ’ des dépenses. De ranimer l’agriculture par l’activité du commerce dans lés provinces, où les denrées sont tombées en non - valeur. De supprimer ks prohibitions & ks empêçhe-- meiis préjudiciables au commerce intérieur, &au commerce réciproque extérieur. .. " D’abolir Ou de modérer les droits excessifs derivière , de péage, qui détruisent les revenus des provinces éloignées, où les denrées ne peuvent être commerçabks que par de longs transports ; ceux -à qui ces droits appartiennent seront suffisamment dédommagés par leur part de l’accroissement général des revenus des biens du royaume. " II n’est pas moins nécessaire d’éteindre les privilèges surpris par.des provinces, par des villes,par dés communautés,pour leurs avantages particuliers.

Il est important aussi de faciliter par-tout les communications & les transports des marchandises, par les réparations des chemins & la navigation des rivières[1]. Il est encore essentiel de ne pas assujettir le commerce des denrées des provinces à des défenses & à des permissions passagères & arbitraires qui ruinent les campagnes, sous le prétexte captieux d’assurer l’abondance dans les villes. Les villes subsistent par les dépenses des propriétaires qui les habitent ; ainsi en détruisant les revenus des biens- fonds, ce n’est ni favoriser les villes, ni procurer le bien de l’état.

Le gouvernement des biens’-fonds dela nation ne doit pas être abandonné à la. discrétion ou à- l’autorité de radministration subalterne & particulière.

On ne doit point borner l’exportation des grains à des provinces particulières, parce qu’elles s’épuisent avant que les autres provinces puissent les regarnir, & les habitans peuvent être exposés


  1. Les chemins ruraux ou de communication avec les grandes routes, les villes & les marchés manquent ou sont mauvais presque par-tout dans les provinces ; ce qui est un grand obstacle à l’activité du commerce. Cependant il semble qu’on pourroit y remédier en peu d’années. Les propriétaires sont trop intéressés à la vente des denrées que produisent leurs biens, pour qu’ils ne voulussent pas contribuer aux dépenses de la réparation de ces chemins. On pourroit donc les imposer pour une petite taxe réglée au sou la livre de la taille de leurs fermiers, & dont les fermiers & les paysans sans bien seroient exempts. Les chemins à réparer seroient décidés par MM. les intendans dans chaque district, après avoir consulté les habitans, qui ensuite les feroient exécuter par les entrepreneurs. On répareroit d’abord les endroits les plus impraticables, & on perfectionneroit successivement les chemins ; les fermiers & paysans seroient ensuite chargés de les entretenir. On pourroit faire avec les provinces de pareils arrangemens pour les rivières qui peuvent être rendues navigables. Il y a des provinces qui ont si bien reconnu l’utilité de ces travaux, qu’elles ont demandé elles-mêmes à être autorisées à en faire les dépenses ; mais on prétend que les besoins de l’état ont quelquefois enlevé les fonds que l’on y avoit destinés : ces mauvais succès ne peuvent qu’étouffer des dispositions si avantageuses au bien de l’état.