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dessus du reproche. L’utilité des écrits politiques est prouvée par le fait ; dans tous les états où l’on jouit d’une honnête liberté à cet égard, l’administration est plus instruite & mieux réglée que par-tout ailleurs. On y voit des réglemens utiles, des loix & des délibérations sages, des établissemens vraiment patriotiques. À qui doit-on la plupart de ces bonnes institutions ? Qui les a inspirées ? Qui en a fait voir l’importance & la nécessité ? Qui en a donné les moyens ? Où en a-t-on trouvé le germe & souvent le développement ? Dans les écrits politiques, dans ces ouvrages où l’on discute avec zèle & impartialité ce qu’il convient de faire pour augmenter l’agriculture, encourager l’industrie, accroître le commerce, mettre le meilleur ordre dans les finances, établir une exacte police dans les villes & dans la campagne, répandre par-tout l’abondance & la félicité.

Ces écrits produisent toutes sortes de bons effets. C’est une espèce d’école publique où se forment des sujets capables de remplir les différens emplois du gouvernement : ils y puisent l’instruction, l’amour du travail & le zèle, sans lequel les plus grands talens deviennent inutiles. Ces mêmes ouvrages nous apprennent encore à juger sainement de ce que le ministère fait pour nous, à ne pas croire opiniâtrement nos propres idées ou celles des hommes chagrins qui ne trouvent jamais rien de bon, à ne point blâmer indiscrètement des opérations, dont on ne voit qu’une face, à ne pas s’entêter pour de nouvelles théories qui présentent la plus belle perspective au premier coup d’oeil, à ne pas s’écrier avec une confiance puérile, si j’étois roi, si j’étois ministre.

S’il faut mépriser les politiques inquiets ou violens, qui invectivent sans cesse le ministère, on doit des égards aux critiques judicieux & sensés qui indiquent le remède du mal qu’ils condamnent.

Enfin les discussions sur les matières politiques ont le double avantage d’avertir l’administration des abus, & d’empêcher que le peuple ne s’accoutume à une administration vicieuse ; ce qui seroit le plus grand des malheurs.

Les princes ineptes ou paresseux confient l’administration des affaires publiques à leurs ministres, comme si le gouvernement n’étoit pas un devoir personnel. Sans doute le chef d’une grande monarchie ne peut ni tout voir, ni tout faire par lui-même ; mais il peut & doit être à la tête de tous ses conseils, & ne jamais permettre qu’on ordonne rien d’important sans son aveu.


Les guerres civiles ont ordinairement pour prétexte la mauvaise administration, les abus des tribunaux, le désordre des finances & l’excès des impôts, les vexations, les monopoles exercés par ceux-mêmes qui devraient les réprimer. Les fruits au contraire d’une administration juste & bienfaisante qui fait régner les loix, qui établit l’empire des mœurs, qui bannit le vice & punit le crime, qui récompense le mérite & emploie les talens, qui écoute de justes plaintes, & fait jouir chacun de ses droits sans acception de personne, qui se montre sensible à tous les besoins du peuple & s’occupe des moyens d’y pourvoir, sont la paix au-dedans & au-dehors, la prospérité, l’affection du peuple, le respect des nations voisines ; en un mot, le degré de bonheur pour le souverain & les sujets que comportent les institutions humaines.

Administrations provinciales. Voyez le Dictionnaire des Finances.

ADMISSION DES MINISTRES PUBLICS, s. f. Qu’un ambassadeur soit envoyé vers un prince ; qu’il soit muni d’une lettre de créance & d’amples pouvoirs ; qu’il soit même annoncé au prince vers lequel il est envoyé, ou à ses ministres, cela ne suffit pas pour entrer en négociation, & se mettre en devoir de remplir l’objet de son ministère ; il faut de plus qu’il soit accrédité & reconnu en qualité de ministre public du prince qui l’envoie.

Il y a deux sortes d’admissions : l’une publique & solemnelle, accompagnée de cérémonies plus ou moins éclatantes, selon l’usage des cours ; l’autre simple, privée & particulière, sans aucune sorte de formalité. La présentation solemnelle de la lettre de créance, l’audience publique, l’entrée accompagnée de tout l’éclat de l’ambassade, forment l’admission publique. La communication réelle de l’envoyé ou de l’ambassadeur avec le souverain ou ses ministres, des conférences sur l’objet de sa mission, des mémoires reçus, des réponses rendues constituent la seconde espèce d’admission qui, pour être dépouillée de tout l’appareil éclatant de l’ambassade, n’en est pas moins réelle, & suffit pour établir le caractère de ministre public. Il est aussi bien autorisé, aussi formellement & peut-être plus essentiellement reconnu par la seconde que par la première ; car on doit regarder comme l’essentiel de l’ambassade, non la pompe extérieure qui la décore, mais la négociation qui en est l’objet.

Un souverain peut-il refuser d’admettre un ministre public qui lui est envoyé ? Le ministre publie reçoit son caractère du souverain qui l’envoie, par la lettre de créance dont il est porteur ; mais il n’en peut faire usage que par l’admission du souverain auprès duquel il est envoyé : cette admission est libre ; l’envoi d’un ambassadeur n’impose point un devoir rigoureux de l’admettre. Prétendre qu’on doit recevoir un ambassadeur quel qu’il soit, & de quelque part qu’il vienne, ce seroit soumettre la volonté d’un souverain à celle d’un autre, & par-là donner atteinte à son indépendance. On n’agit donc point contre le droit des gens en refusant d’admettre un ambassadeur, quand même il seroit envoyé par une puissance alliée. Ce refus