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DISCOURS

mention des miroirs d’Archimède. Le silence de ces Historiens n’est qu’une preuve purement négative, qui doit céder aux assertions positives & contraires de ceux que nous avons nommés.

Il me semble que les témoignages de Zonaras & de Tzetzès doivent avoir ici à-peu-près le même poids qu’auroient ceux des anciens Écrivains sur lesquels ils s’appuient. Après avoir raconté qu’Archimède avoit embrâsé la flotte des Romains, au moyen des rayons solaires, rassemblés & réfléchis par le poli d’un miroir, Zonaras ajoute qu’à cet exemple, Proclus brûla, avec des miroirs d’airain, la flotte de Vitalien qui assiégeoit Constantinople, sous l’Empire d’Anastase, l’an 514 de Jesus-Christ. Tzetzès entre dans un plus grand détail sur les miroirs d’Archimède ; il en explique ainsi la construction : « Lorsque Marcellus eut éloigné ses vaisseaux à la portée du trait, Archimède fit jouer un miroir exagone composé de plusieurs autres plus petits, qui avoient chacun 24 angles, & qu’on pouvoit mouvoir, à l’aide de leurs charnières & de certaines lames de métal ; il plaça ce miroir de manière qu’il étoit coupé en son milieu par le méridien d’hiver & d’été, en sorte que les rayons du soleil, reçus par ce miroir, venant à se briser, allumèrent un grand feu qui réduisit en cendres les vaisseaux des Romains, quoiqu’ils fussent éloignés de la portée du trait. » Ce passage indique, comme on voit, la manière dont les parties du miroir tournoient pour prendre la position convenable, l’exposition directe où il étoit par rapport au soleil, & enfin la distance à laquelle il portoit le feu.

Le Père Kircher, Jésuite, dit, dans son ouvrage, intitulé : Ars magna lucis & umbrœ, qu’il avoit fait construire d’après la description de Tzetzès, un miroir composé de plusieurs verres plans qui, réfléchissant tous la lumière du soleil en un même point, y produisirent une chaleur considérable.

M. de Buffon a exécuté en grand cette expérience, & par-là il a constaté les effets des miroirs d’Archimède. En 1747, il fit construire, par M. Passemant, un miroir par réflexion, composé de 168 glaces planes, mobiles à charnières, & qu’on pouvoit faire jouer toutes à-la-fois, ou seulement en partie. Au moyen de cet assemblage, il embrâsa, au mois d’avril, & par un soleil assez foible, le bois à 150 pieds de distance ; il fondit le plomb à 140 pieds ; ce qui est plus que suffisant pour démontrer la réalité de la découverte d’Archimède.

Il y a, dans la succession des connoissances humaines, une fatalité qui n’amène presque jamais les plus utiles que les dernières. Les anciens, qui savoient employer, avec tant de succès, la propriété