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AIM

touchant par ſon pôle nord, & l’autre par ſon pôle ſud.

Ayant aimanté ainſi des deux côtés, & à pluſieurs repriſes différentes, chaque courbe avec les faiſceaux de ſix lames, on les aſſembla toutes pour en former un ſeul aimant artificiel, auquel furent ajoutées deux armures dans la forme ordinaire. Par-là on obtint un aimant qui, ſous le poids de deux livres, en ſupporte près de quarante, & qui dès-lors peut être mis en comparaiſon avec les plus forts que l’on ait faits. Il eſt probable qu’en continuant de ſemblables expériences, on iroit encore au-delà. Cette méthode d’aimanter une courbe n’exige point le grand nombre de ſupports employés dans la méthode de MM. Duhamel & Anthéaume, ni dans celle de MM. Michell & Canton.

Ces ſupports, qui ſeroient au nombre de cent dix lames de ſix pouces, pour un aimant de ſix pieds, ſont néceſſaires afin que l’extrémité d’une barre ne perde pas le magnétiſme qu’elle a reçu pendant qu’on touchoit l’autre extrémité ; mais comme, par le moyen des deux faiſceaux employés, les deux extrémités d’une barre, ou les deux bras d’une courbe ſont aimantés tout-à-la-fois, les ſupports n’y ſont plus néceſſaires. Le procédé qu’on vient de détailler eſt auſſi très-propre à former des aiguilles pour les compas de mer ; car elles s’aimantent très-bien & très-promptement, au moyen de deux aimans que l’on fait partir du centre, & que l’on conduit tout-à-la-fois vers chaque extrémité, l’un frottant par ſon pôle nord, & l’autre par ſon pôle ſud.

Lorſque l’on veut aimanter une courbe, on le peut faire de deux manières, ſans compter celle dont on a parlé ci-deſſus ; 1o. avec une courbe de même grandeur, qu’on élève perpendiculairement ſur l’autre, & avec laquelle on frotte depuis la naiſſance de la courbure juſqu’à l’extrémité des branches, de la même manière que ſi c’étoit deux aimans ſéparés. Le pôle nord forme par-là un pôle ſud, & réciproquement tous les deux agiſſant à-la-fois. 2o. On peut aimanter la courbe d’une autre manière avec deux barreaux. Pour cela, on place deux pièces ſemblables bout à bout, de manière qu’elles compoſent une ſeule courbe ovale rentrante. On touche cette courbe avec les barreaux aimantés que l’on tient d’une main, peu éloignés l’un de l’autre, en faiſant tout le tour ; on forme ainſi deux aimans artificiels tout-à-la-fois, & l’on évite encore les ſupports par cette voie : on donne même à chacun des deux fers plus de force qu’ils n’en auroient acquis ſéparément. Après qu’on les a ſéparés, on trouve que les pôles qui étoient contigus ſont de dénomination différente, & que le pôle nord de l’un ſe trouve contre le pôle ſud de l’autre.

En réuniſſant pluſieurs lames aimantées, il eſt naturel de chercher dans quel rapport cette force augmente par la réunion. On trouve, en comparant avec l’expérience, que la force augmente plus que les ſurfaces, mais moins que les maſſes.

Comme, dans cette méthode, on a aimanté des barreaux, ſans employer des aimans naturels ou artificiels, on l’a rangée parmi les procédés qui ont rapport à cet objet. On obſervera cependant que le reſte de la méthode peut également appartenir aux méthodes d’aimanter avec des aimans artificiels, & être placée après le premier procédé de M. Anthéaume, qui a été rapporté ci-deſſus, pour aimanter avec des aimans.

Pour faire de bons aimans artificiels, indépendamment d’une bonne méthode d’aimanter, pluſieurs autres conditions ſont néceſſaires. On doit employer du bon acier, d’un grain fin, ſerré, homogène & d’une grande compacité, afin qu’il reçoive une plus forte doſe de magnétiſme, & qu’il la conſerve long-temps. En forgeant l’acier on ne doit le replier en aucun ſens. Il faut auſſi proſcrire tous les barreaux qui préſenteroient des ſoufflures ou des gerçures. Voyez Aiguille aimantée.

M. Anthéaume aſſure avoir remarqué que les aciers de Carme ou à la Roze, & l’acier d’Angleterre, ſont les meilleurs pour faire des barres magnétiques : il obſerve, que lorſqu’on veut que les barres ſoient trempées dur ſans recuit, & qu’elles reçoivent bien la vertu magnétique, la trempe qui conviendroit à l’un, ne convient pas à l’autre : l’acier de Carme ou à la Roze réuſſit très-bien trempé dur à l’ordinaire ; l’acier d’Angleterre réuſſit mieux trempé en paquet.

M. Briſſon ayant voulu ſavoir, par expérience, quelle étoit l’eſpèce d’acier la plus propre à faire des aimans artificiels, l’eſpèce ſuſceptible de recevoir la plus grande vertu magnétique, fit faire cinq paires de barreaux de différentes eſpèces d’acier, tous parfaitement égaux en longueur, en largeur, en épaiſſeur, & même en poids, à quelques grains près ; tous également bien dreſſés & polis ; tous trempés de tout leur dur. Chacun de ces barreaux étoit de 6 pouces & trois quarts de ligne de long, 6 lignes de large & 2 lignes d’épaiſſeur, & chaque paire peſoit 5 onces 4 gros & environ ⅔ de gros. Ils furent placés deux à deux à la manière de M. Knight, en les ſéparant par une règle de bois, & les faiſant communiquer, à chacune de leurs extrémités, par un contact de fer doux de 9 lignes de largeur : pour éviter la confuſion, ils furent tous numérotés.

Les eſpèces d’acier, employées à faire ces barreaux, étoient l’acier d’Amboiſe ; l’acier fondu d’Amboiſe, l’acier d’Allemagne, connu ſous le nom d’étoffe de Pons ; l’acier d’Angleterre & l’acier fondu d’Angleterre. Tous ces barreaux furent aimantés ſuivant la méthode de M. Anthéaume, expoſée ci-deſſus, avec une paire d’excellens barreaux aimantés de 17 pouces 6 lignes de long, 1 pouce de