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AIR
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comprimé par le poids de l’air extérieur. Dès qu’on fait rentrer l’air dans le récipient, les bulles dilatées ſont de nouveau comprimées, & on n’apperçoit preſque plus de diſſolution de continuité ; je dis preſque plus, parce que communément on en apperçoit quelques-unes qui réſultent de ce que pluſieurs portions d’air intérieur, originairement ſéparées, ſe ſont extraordinairement réunies, & que la preſſion de l’air qui rentre, n’eſt plus ſuffiſante pour les comprimer au point de les rendre inſenſibles.

Ce qu’on obſerve dans cette expérience, a lieu dans le ſyſtême général des liqueurs contenues dans le corps animal. L’air, renfermé dans ces liqueurs différentes, éprouve une expanſion qui produit un grand nombre d’interruptions dans leurs maſſes ; la circulation du ſang ne peut qu’en être interrompue, & ſa néceſſité eſt ſi grande, qu’on ne ſera point étonné que de cette ſuſpenſion, que de l’engorgement général de tous les liquides, la mort n’en réſulte. D’où il ſuit que cette cauſe doit concourir avec celle de la raréfaction de l’air portée à un certain point, laquelle rend l’air impropre à la reſpiration, le jeu alternatif d’inſpiration & d’expiration ne pouvant avoir lieu dans ce cas.

Il eſt inutile d’obſerver que, dans un animal placé dans le vide, ce ne ſont pas ſeulement les liqueurs & l’air qui y eſt renfermé qui augmentent de volume, mais encore les vaiſſeaux qui les contiennent. Ceux-ci éprouvent une grande diſtention capable de rompre les fibrilles & les dernières ramifications de ces vaiſſeaux. Les liqueurs animales ſortent alors de leurs réſervoirs, & s’extravaſent en plus ou moindre quantité. Maintenant on ne ſera pas étonné que les animaux ſe vident aſſez ſouvent par les voies ordinaires, par un effet de l’expanſion de l’air intérieur, ainſi que nous l’avons dit ; & que, de toute la ſurface de leurs corps, il y ait une ſueur plus ou moins abondante, ſelon la nature des animaux. Les plumes & les poils empêchent ordinairement de s’en appercevoir ; mais ſi on en dépouille l’animal, on en ſera convaincu. Une expérience plus facile à faire ne permet pas d’en douter. Si on place la paume de la main ſur un petit récipient, ou tube de verre ouvert par ſes deux extrémités, & qu’on faſſe le vide, on verra la ſueur ſortir de la ſurface de la main qui répond à l’ouverture ſupérieure. On ſait que les bords de cette ouverture ſont arrondis. Voyez Pesanteur de l’air.

Ajoutons ici que les animaux à qui on a fait pluſieurs fois de ſuite ſubir l’épreuve du vide, y réſiſtent mieux après. Je me ſuis ſervi quelques jours de ſuite d’un même oiſeau, qui, quoique affroidi, réſiſtoit mieux qu’un animal vigoureux de même eſpèce, qui n’avoit point encore été mis en expérience. On doit cependant convenir que, pluſieurs jours après l’expérience, les animaux ſoumis à l’épreuve du vide, & auxquels on a rendu l’air à-propos, meurent par une fuite de l’air & des liquides extravaſés. L’expérience relative à la figure que nous venons de citer immédiatement, celle du tube capillaire tortueux, rempli d’eau colorée ou d’eſprit-de-vin, le démontre.

La rentrée ſubite & rapide de l’air dans les poumons des animaux ſoumis à l’expérience du vide, & qu’on déſire de conſerver en leur rendant l’air, eſt encore une cauſe du mal-aiſe qu’ils en reſſentent, & capable d’occaſionner leur mort quelques jours après. Selon le calcul qu’on en a fait, l’air de l’atmoſphère, en entrant dans le vide, va avec une vîteſſe qui lui feroit parcourir 1 305 pieds dans une ſeconde, c’eſt-à-dire, ſelon le docteur Papin, que la vîteſſe avec laquelle l’air entre dans un récipient vide, lorſqu’il y eſt pouſſé par la preſſion de toute l’atmoſphère, eſt à raiſon de 1 305 pieds pendant l’eſpace d’une ſeconde, ce qui fait 889 mille par heure, vîteſſe près de 18 fois plus grande que celle des plus fortes tempêtes, qui eſt eſtimée être environ de 50 mille par heure. Or, qui pourra ſe perſuader que cette impulſion rapide de l’air qui rentre dans les poumons particulièrement, que ce choc terrible dont la vîteſſe eſt d’autant plus grande que l’air intérieur a été plus raréfié ? qui pourra ſe perſuader que cette cauſe n’influe pas puiſſamment ſur la mort des animaux ſoumis à l’épreuve du vide ?

L’air eſt non ſeulement néceſſaire aux animaux, mais encore il doit être pur ; car s’il eſt vicié, il trouble ſingulièrement les fonctions de l’économie animale, & l’animal peut périr ſi l’air eſt chargé à un certain point de ſubſtances hétérogènes, ainſi que l’expérience le prouve, en employant l’appareil ſuivant qu’on voit dans la figure 151, ſur une platine circulaire b, b, on place un trépied ſurmonté d’une tablette c, c, ſur laquelle on poſe le vaſe de terre cuite d, dans lequel on met un morceau de fer e, concave dans ſa partie ſupérieure & rougi au feu. Le tout eſt recouvert après y avoir mis un animal, d’un récipient cilindrique de verre Α, Α, B, ouvert par ſes deux bouts & fermé ſupérieurement par une platine Α, Α, percée au milieu, pour y recevoir un entonnoir H.

Ceci ſuppoſé, voici les réſultats des expériences qu’a faites Muſſchenbroeck, & que je répète dans mes cours publics de phyſique. Si on verſe de l’eau par l’entonnoir, elle ſe change en vapeur épaiſſe qui cauſe à un oiſeau de fortes inquiétudes, en lui occaſionnant des convulſions, néanmoins il n’en meurt pas. La vapeur du vinaigre produit le même effet ſur un autre oiſeau. Celle de l’eſprit-de-vin fait tomber en convulſion un nouvel oiſeau qui vacille de moment à autre ; ordinairement il ne ſe rétablit pas comme dans les deux cas précédens. La fumée d’eſprit de térébentine ſuffoque l’animal qu’on ſoumet à cette épreuve. J’y ai vu périr non ſeule-