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De la paille allumée entre les deux miroirs, en diminue conſidérablement l’action ; ce qui revient à l’obſervation de M. Homberg ſur le grand miroir ardent du Palais-royal, qui agiſſoit beaucoup moins pendant de grandes chaleurs, que quand l’air venoit d’être rafraîchi par la pluie. Une partie des rayons réunis par le miroir ardent, étoient peut-être abſorbés ou détournés de leur direction par les ſoufres répandus dans l’air pendant les grandes chaleurs ; & les ſoufres allumés qui font la flamme de la paille, produiſoient apparemment, dans le cas dont il s’agit, un effet ſemblable.

Le vent même violent ne diminue point ſenſiblement l’action des miroirs, ſoit que ſa direction ſoit préciſément contraire à celle des rayons qui vont d’un miroir à l’autre, ſoit qu’il la coupe à angles droits.

Un charbon ayant été placé au foyer d’un verre convexe des deux côtés, d’où les rayons qui l’ont traverſé en s’y rompant, ſortoient parallèles, M. Dufay a reçu ces rayons ſur la ſurface d’un miroir concave qui les réuniſſoit à ſon foyer : mais ces rayons n’ont pu brûler que quand le verre & le miroir n’ont été éloignés que de quatre pieds, tant les rayons ſe ſont affoiblis en paſſant au-travers du verre. Et il faut bien remarquer que ces rayons ſont ceux d’un charbon ; car ceux du ſoleil, ou ne s’affoibliſſent pas ainſi, ou s’affoibliſſent beaucoup moins : d’où M. Dufay conclut qu’il doit y avoir une grande différence entre le feu du ſoleil & nos feux ordinaires, dont les parties doivent être beaucoup plus maſſives, & plus ſujettes à s’embarraſſer dans des paſſages étroits.

Le P. Tacquet a obſervé que ſi on place une chandelle au foyer d’un miroir parabolique, l’image de cette chandelle reçue loin du miroir, ne paroît pas ronde, comme elle le ſeroit en effet ſi tous les rayons réfléchis étoient parallèles à l’axe ; mais cette image a une figure ſemblable à celle de la chandelle, parce que la chandelle n’étant pas un point, les rayons qu’elle envoye ne ſe réfléchiſſent pas parallèlement à l’axe du miroir parabolique.

On ſait que la courbe nommée ellipſe a cette propriété, que des rayons qui partiroient d’un de ſes foyers, & qui tomberoient ſur la concavité de cette courbe, ſe réuniroient tous à l’autre foyer. Cependant M. Dufay ayant mis un charbon au foyer d’un miroir elliptique travaillé avec tout le ſoin poſſible, & n’ayant pas eu égard à la groſſeur de ce charbon, les rayons ne ſe ſont jamais réunis en aſſez grand nombre à l’autre foyer, pour pouvoir brûler ; mais lorſqu’au lieu d’un charbon il y mettoit une bougie allumée, les rayons ſe réuniſſoient exactement à l’autre foyer, & y cauſoient une chaleur ſenſible, mais n’avoient pas la force de brûler ; ce qui arrive de même avec les miroirs paraboliques, ſans doute parce que les parties de la flamme ſont trop déliées pour conſerver long-temps leur mouvement dans l’air.

Si on met au foyer d’un miroir parabolique ou ſphérique un charbon ardent, les rayons qui, après avoir rencontré le miroir, ſont réfléchis parallèlement à l’axe, ou à-peu-près, forment une eſpèce de cylindre, dans l’eſpace duquel on ſent une chaleur à-peu-près égale à celle d’un poèle, & qui eſt ſenſible juſqu’à 20 ou 30 pieds ; de façon qu’avec quelques charbons on pourroit échauffer une ſerre pour des plantes, ou quelqu’autre endroit d’une largeur médiocre : on pourroit auſſi donner aux contre-cœurs des cheminées une forme ſphérique ou parabolique, ce qui les rendroit beaucoup plus propres à renvoyer la chaleur, que les plaques ordinaires. Voyez l’hist. & les mém. de l’acad. 1726.

La phyſique, dit M. Macquer, dans un mémoire lu à l’académie des ſciences, n’offre guère de phénomènes plus curieux, & en même-temps plus inſtructifs que ceux qui ſe manifeſtent lorſqu’on expoſe différens corps au foyer des grands verres ou miroirs brûlans. L’action cependant d’une quantité peu conſidérable en elle-même de rayons de ſoleil, réunis dans un plus petit eſpace, eſt ſi violente, qu’elle occaſionne, en quelques ſecondes, des effets plus forts que ceux de tout autre feu, ſoutenu très-long-temps. Dès la naiſſance de la phyſique expérimentale, on fit, en conſéquence de cette vérité, des miroirs & des verres brûlans, d’un grand diamètre & d’un grand effet. Les miroirs concaves de Villette, & les lentilles de Tſchirnhauſen devinrent bientôt célèbres par les belles expériences qu’on fit à leur foyer, qu’on a déjà fait connoître.

La vitrification de l’or au foyer d’une des deux grandes lentilles de Tſchirnhauſen, quoique donnée comme certaine par M. Homberg, fut enſuite regardée comme douteuſe. M. Geoffroi, depuis M. Homberg, fit au foyer de cette même lentille, une ſuite d’expériences beaucoup plus exactes & plus circonſtanciées ſur les métaux, dont il rendit compte à l’académie des ſciences, mais il ne parla ni de l’or ni de l’argent. La lentille dont il ſe ſervit eſt la grande lentille de Tſchirnhauſen, qui avoit appartenue à M. le duc d’Orléans, régent, & qui fit enſuite partie des machines que légua à l’académie, M. Pajot d’Ons-en-Bray.

MM. Macquer, Cadet, Brisson & Lavoiſier, firent dans les mois d’août, ſeptembre, octobre & novembre 1772, pluſieurs expériences avec la lentille dont nous venons de parler, & avec une ſeconde lentille de Tſchirnhauſen, du même diamètre que celle de l’académie, c’eſt-à-dire, de trente-

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