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que la denſité ou la maſſe de l’air dans chacune des parties de la hauteur, eſt proportionnelle à la maſſe ou au poids de l’air ſupérieur ; & que par conſéquent cette maſſe, ou ce poids de l’air ſupérieur eſt proportionnelle à la différence entre les maſſes de deux parties d’air contiguës priſes depuis la ſurface de l’atmoſphère ; or, nous ſavons par un théorème de géométrie, que lorſque des grandeurs ſont proportionnelles à leurs différences, ces grandeurs ſont en proportion géométrique continue ; donc, dans la ſuppoſition que les parties de la hauteur de l’air forment une progreſſion arithmétique, la denſité, ou ce qui revient au même, le poids de ces parties, doit former une proportion géométrique continue.

Par le moyen de cette ſérie, il eſt facile de trouver la raréfaction de l’air à une hauteur quelconque, ou la hauteur de l’air, correspondante à un degré donné de raréfaction, en obſervant, par deux ou trois hauteurs de baromètre, la raréfaction de l’air à deux ou trois hauteurs différentes ; d’où l’on conclura la hauteur de l’atmoſphère, en ſuppoſant que l’on ſache le dernier degré de raréfaction, au-delà duquel l’air peut aller. Voyez les articles Baromètre, Aurore, Boréale. Voyez auſſi Grégory Aſtronom. Phyſ. & Géom. liv. V. prop. 3. & Halley dans les tranſact. Phil. n°. 181.

Il faut avouer cependant que ſi on s’en rapporte à quelques obſervations faites par M. Caſſini, on ſera tenté de croire que cette méthode de trouver la hauteur de l’atmoſphère eſt fort incertaine. Cet aſtronome, dans les opérations qu’il fit pour prolonger la méridienne de l’obſervatoire de Paris, meſura avec beaucoup d’exactitude les hauteurs des différentes montagnes qui ſe rencontrèrent dans ſa route ; & ayant obſervé la hauteur du baromètre ſur le ſommet de chacune de ces montagnes, il trouva que cette hauteur, comparée à la hauteur des montagnes, ne ſuivoit point du tout la proportion indiquée ci-deſſus ; mais que la raréfaction de l’air à des hauteurs conſidérables au-deſſus de la ſurface de la terre, étoit beaucoup plus grande qu’elle ne devroit être, ſuivant la règle précédente.

L’académie royale des ſciences ayant donc quelque lieu de révoquer en doute l’exactitude des expériences ; elle en fit un grand nombre d’autres ſur des dilatations de l’air très-conſidérables, & beaucoup plus grandes que celles de l’air ſur le ſommet des montagnes ; & elle trouva toujours que ces dilatations ſuivoient la raiſon inverſe des poids dont l’air étoit chargé ; d’où quelques phyſiciens ont conclu, que l’air qui eſt ſur le ſommet des montagnes, eſt d’une nature différente de l’air que nous reſpirons ici-bas, & ſuit apparament d’autres loix dans ſa dilatation & ſa compreſſion.

La raiſon de cette différence doit être attribuée à la quantité de vapeurs & d’exhalaiſons groſſières, dont l’air eſt chargé ; & qui eſt bien plus conſidérable dans la partie inférieure de l’atmoſphère qu’au-deſſus. Ces vapeurs étant moins élaſtiques, & moins capables par conſéquent de raréfaction que l’air pur, il faut néceſſairement que les raréfactions de l’air pur augmentent en plus grande raiſon que le poids ne diminue.

Cependant M. de Fontenelle explique autrement ce phénomène, d’après quelques expériences de M. de la Hire ; il prétend que la force élaſtique de l’air s’augmente par l’humidité  ; & qu’ainſi l’air qui eſt proche le ſommet des montagnes, étant plus humide que l’air inférieur, eſt par-là plus élaſtique, & capable d’occuper un plus grand eſpace qu’il ne devroit occuper naturellement, s’il étoit plus ſec.

Mais M. Jurin ſoutient que les expériences dont on ſe ſert pour appuyer cette explication, ne ſont point du tout concluantes. Append. ad Varen. Geograph.

M. Daniel Bernoulli donne dans ſon Hydrodynamique une autre méthode pour déterminer la hauteur de l’atmoſphère ; dans cette méthode, qui eſt trop géométrique pour pouvoir être expoſée ici, & miſe à la portée du commun des lecteurs, il fait entrer la chaleur de l’air parmi les cauſes de la dilatation.

La règle des compreſſions en raiſon des poids, ne peut donner la hauteur de l’atmoſphère ; car il faudroit que cette hauteur fût infinie, & que la denſité de l’air fût nulle à ſa ſurface ſupérieure. Il ſeroit plus naturel de ſuppoſer la denſité de l’air proportionnelle, non au poids comprimant, mais à ce même poids augmenté d’un poids constant : alors la hauteur de l’atmoſphère ſeroit finie, & ne seroit pas plus difficile à trouver que dans la première hypothèſe, comme il eſt démontré dans le traité des fluides de M. d’Alembert.

Quoi qu’il en ſoit, il eſt conſtant que les raréfactions de l’air à différentes hauteurs, ne ſuivent point la proportion des poids dont l’air eſt chargé ; par conſéquent les expériences du baromètre faites au pied & ſur le ſommet des montagnes, ne peuvent nous donner la hauteur de l’atmoſphère, puiſque ces expériences ne ſont faites que dans la partie la plus inférieure de l’air. L’atmoſphère s’étend bien au-delà ; & ſes réfractions s’éloignent d’autant plus de la loi précédente, qu’il eſt plus éloigné de la terre. C’est ce qui a engagé M. de la Hire, après Kepler, à ſe ſervir d’une méthode plus ancienne, plus ſimple & plus ſûre pour trouver la hauteur de l’atmoſphère : cette méthode eſt fondée ſur l’obſervation des crépuſcules.

Tous les aſtronomes conviennent que quand le ſoleil eſt à dix-huit degrés au-deſſous de l’horiſon,