Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/386

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
372
AUR

qu’ils ont vue aſſez conſtamment autour du pôle méridional, lumière qui occupe un eſpace tantôt plus, tantôt moins grand, & dont l’éclat n’eſt pas même effacé par celui de la lune. Ces caractères ne conviennent, ſans contredit, qu’aux aurores polaires.

On vit à Cuſco, le 20 août 1744, une aurore auſtrale, qui y jeta la plus grande conſternation, ainſi qu’il conſte par le témoignage de D. Ignace de Chiriboga, chanoine de Quito, qui en inſtruiſit M. de la Condamine. Hiſt. de l’Acad. 1745, p. 17. Le capitaine Roſnevet en a vu une vers le quarante neuvième degré de latitude qui déclinoit de dix degrés du ſud à l’eſt.

M. Dagelet, aſtronome Français, qui partit pour aller aux terres auſtrales avec M. de Kuerguelin, ſur la frégate du roi l’Oiſeau, commandée par M. de Roſnevet, obſerva une aurore auſtrale, par les 65 degrés de longitude & 48 degrés de latitude ſud. Le 15 décembre 1773, à neuf heures & demie du ſoir, il vit une lumière fort conſidérable, dont la hauteur étoit de 30 à 35 degrés, & la largeur avoit à-peu-près cette étendue. Cette lumière étoit moins rouge & moins vive que celles qu’ont ordinairement les aurores boréales. Il y avoit pluſieurs jets de faiſceaux bien terminés qui déclinoient tous vers l’eſt, comme les aurores boréales vers l’oueſt. Elle dura à-peu-près trois quarts d’heure avant de s’affoiblir ſenſiblement. Le baromètre étoit à 27 pouces 9 lignes, & le thermomètre de M. de Réaumur étoit à 2 degrés au-deſſus du point de la congellation. On étoit alors à 12 ou 15 lieues de la terre. Journ. des ſav. 1774, p. 878.

Des principes que nous établirons, pour expliquer l’aurore boréale, il réſulte que la matière électrique des hautes régions se porte plutôt aux pôles ; qu’à l’équateur, à cauſe de la force centrifuge du globe de la terre qui, par un effet de la rotation, eſt plus grande ſous l’équateur que vers les pôles ; d’où il ſuit que les aurores polaires, toutes choſes égales, doivent être auſſi fréquentes au pôle ſud qu’au pôle nord ; mais diverſes circonſtances s’oppoſent à ce que les apparitions des aurores dont nous parlons, ſoient aperçus auſſi fréquemment au midi qu’au ſeptentrion. Le peu de correſpondances avec les habitans du ſud, l’état d’ignorance dans lequel ils ſont plongés, la rareté des voyages des Européens, les brumes conſidérables qui règnent dans ces parages, &c. ſont autant de cauſes qui dérobent à notre connoiſſance les aurores auſtrales ; de ſorte qu’on ne peut fonder, ſur cet article particulier, une objection contre les explications données de ce phénomène.

Mais quelles ſont les limites géographiques dans leſquelles ſont renfermées les apparitions de l’aurore boréale ou méridionale. Non-ſeulement elle paroît ſouvent dans l’Iſlande, le Groënland, la Suède, la Pruſſe, le Dannemarck, l’Allemagne, mais encore fréquemment en France, en Angleterre, en Hollande, &c. On l’a vue pluſieurs fois en Espagne, à Toloſa, en Guiſpuſcoa, à Cadix ſur-tout, qui est au 36me degré 25 minutes de latitude ; dans quelque contrées d’Italie, en 1726, par M. Manfredi à Bologne, &c, &c., mais elle eſt très-rare ; à la Chine, en 1718, 1719 & 1722, & quelques autres fois depuis. M. de Mairan ne croit pas qu’on puiſſe voir l’aurore, dont npus parlons, au-deſſous de 35 degrés de latitude. Cette opinion n’eſt pas fondée, car elle a quelquefois paru dans des contrées aſſez proches de l’équateur. Selon les Mémoires de l’académie des ſciences de Paris, année 1747 (Hiſt. pag. 17), le 20 août 1744, on vit une aurore polaire à Cuſco, qui eſt au 12me degré de latitude ſud ; elle y répandit l’effroi, au point que les indiens & même les espagnols la prirent pour un préſage de la fin du monde : c’eſt ce que penſoient les Français & la plupart des autres européens dans les ſiècles de ténèbres, tant la crainte eſt propre à l’ignorance. Le capitaine Cook vit une aurore auſtrale, étant à 10 degrés au ſud de l’équateur, le 16 ſeptembre 1770 ; ſon élévation au-deſſus de l’horiſon étoit de 20 degrés, & ſon amplitude de 100 degrés environ.

Déclinaison de l’aurore boréale. Il s’agit de ſavoir ſi l’aurore boréale décline ou ne décline pas du point vrai du nord ; & dans le premier cas, de combien elle en décline. Cette queſtion ne peut recevoir une ſolution que de l’obſervation. Comme celle-ci n’eſt pas conſtante, on ne peut encore rien prononcer avec certitude.

Les anciens auteurs qui ont obſervé l’aurore boréale depuis le milieu du ſeizième ſiècle n’ont pas eu l’intention de fixer cet objet ; ils ſe ſont contentés de dire que l’aurore boréale étoit au nord ou à-peu-près. Peut-être ſa déclinaiſon étoit-elle auſſi grande qu’on le remarque à préſent, peut-être étoit-elle moindre, & quelquefois nulle.

Dans l’aurore boréale du 12 ſeptembre 1621, que Gaſſendi obſerva en Provence, le ſommet de l’arc lumineux étoit ſous le nord ; & cet arc s’étendoit vers le levant, & le couchant d’été, à près de 60 degrés d’amplitude.

L’aurore boréale ſe montra en 1687, depuis la fin de juin juſqu’au 10 juillet, & l’illuſtre Dominique Caſſini dit qu’elle paroiſſoit à 11 heures & à minuit, quand la lune ne ſe levoit que fort tard, qu’on la voyoit entre les pieds de devant de la grande ourſe & la chèvre qui étoient preſque à égale diſtance du méridien, l’une du côté d’occident, l’autre du côté de l’orient.

En 1718, M. Maraldi obſerva que l’aurore