Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/427

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augmentera de vîteſſe en raiſon triple : on aura donc la triple octave.

Il ſe trouve des tons dans toutes ces différentes octaves, plus difficiles à rendre les uns que les autres ; on est pour lors obligé de les ajuſter, en plaçant les lèvres ſur une plus grande ou une plus petite corde du trou de la flûte, en donnant un vent plus oui moins fort ; ce que fait l’homme dans les mêmes tons où il est obligé de ménager ſon vent, & de tourner la flûte plus ou moins en dedans ou en dehors.

On conçoit facilement que toutes les lames placées ſur le cylindre ſont plus ou moins longues, ſuivant le temps que doit avoir chaque note, & ſuivant la différente ſituation où doivent ſe trouver les doigts pour les former ; ce qu’on ne détaillera point ici pour ne point donner à cet article trop d’étendue. On fera remarquer que dans les enflemens de ſon, il a fallu, pendant le temps de la même note, ſubstituer imperceptiblement un vent foible à un vent fort, & à un plus fort un plus foible, & varier conjointement ſes mouvemens des lèvres, c’est-à-dire, les mettre dans leur ſituation propre pour chaque vent.

Lorſqu’il a fallu faire le doux, c’est-à-dire, imiter un écho, on a été obligé de faire avancer les lèvres ſur le bord du trou de la flûte, & envoyer un vent ſuffiſant pour former un tel ton ; mais dont le retour, par une iſſue auſſi petite, qui eſt celle de ſon entrée dans la flûte, ne peut frapper qu’une petite quantité d’air extérieur ; ce qui produit, comme on l’a dit ci-deſſus, ce qu’on appelle écho.

Les différens airs de lenteur & de mouvement ont été meſurés ſur le cylindre, par le moyen d’un lévier, dont une extrémité, armée d’une pointe, pouvoit, lorſqu’on frappoit deſſus, marquer ce même cylindre ; à l’autre bras du lévier étoit un reſſort, qui faiſoit promptement relever la pointe : on lachoît le mouvement qui faiſoit tourner le cylindre avec une vîteſſe déterminée pour tous les airs ; dans le même temps une perſonne jouoit ſur la flûte l’air qu’on vouloit meſurer ; un autre battoit la meſure ſur le bout du lévier qui pointoit le cylindre, & la diſtance qui ſe trouvoit entre les points étoit la vraie meſure des airs qu’on vouloit noter ; on ſubdiviſoit enſuite les intervalles en autant de parties que la meſure avoit de temps.

Combien de fineſſe dans tout ce détail, diſoit M. Diderot ! que de délicateſſes dans toutes les parties de ce méchaniſme ! ſi cet article, au lieu d’être l’exposition d’une machine exécutée, étoit le projet d’une machine à faire, combien de gens ne le traiteroient-ils pas de chimère ? quant à moi, il me ſemble qu’il faut avoir bien de la pénétration & un grand fond de méchanique pour concevoir la poſſibilité du mouvement des lèvres de l’automate, de la ponctuation du cylindre & d’une infinité d’autres particularités, de cette deſcription. Si quelqu’un nous propoſe donc jamais une machine moins compliquée, telle que ſeroit celle d’un harmonomètre ou d’un cylindre diviſé par des lignes droites & des cercles dont les intervalles marqueroient les meſures, & percé ſur ces intervalles de petits trous, dans leſquels on pourroit inſérer des pointes mobiles qui, s’appliquant à diſcrétion ſur telles touches d’un clavier que l’on voudroit, exécuteroient telle pièce de muſique qu’on déſireroit, à une ou pluſieurs parties, alors gardons-nous bien d’accuſer cette machine d’être impoſſible, & celui qui la propoſe d’ignorer la muſique, nous riſquerions de nous tromper lourdement ſur l’un & l’autre cas.

Par cette deſcription, on voit combien peu étoit fondé le ſoupçon que pluſieurs personnes eurent les premiers jours où l’automate, joueur de flûte, fut montré au public. Elles s’étoient imaginé que ce n’étoit qu’une ſerinette ou une orgue d’Allemagne, enfermée dans le corps de la figure, dont les ſons ſortoient par la bouche de l’automate ; mais les plus incrédules furent bientôt convaincus que l’automate faiſoit réellement uſage de ſes lèvres pour l’embouchure de ſa flûte, que le vent, au ſortir de ſes lèvres, la faiſoit raiſonner, & que le mouvement des doigts étoit néceſſaire pour former les différens tons. La machine fut ſoumiſe à l’examen le plus scrupuleux & aux épreuves les plus décisives ; il fut permis à tous les ſpectateurs de voir les reſſorts les plus cachés & d’en ſuivre le jeu. On interpoſa pluſieurs fois des feuilles de papier entre quelques doigts de l’automate, & les trous correſpondans de la flûte, & on s’aperçut que des tons n’avoient pas lieu, on eut recours à tous les moyens qu’on pût imaginer pour mettre la machine en défaut, & toujours elle ſortit victorieuſe de toutes les épreuves.

2o. Le ſecond automate eſt le joueur de tambourin, planté tout droit ſur ſon piédeſtal, habillé en berger danseur, qui joue une vingtaine d’airs, menuets, rigodons, ou contredanſes.

On croiroit d’abord que les difficultés ont été moindres qu’au flûteur automate : mais, ſans vouloir élever l’un pour rabaiſſer l’autre, il faut faire attention qu’il s’agit de l’inſtrument le plus ingrat & le plus faux par lui-même, qu’il a fallu faire articuler une flûte à trois trous, où tous les tons dépendent du plus ou moins de force du vent, & de trous, bouchés à moitié, qu’il a fallu donner tous les vents diftérens, avec une vîtesse que l’oreille a de la peine à ſuivre, donner des coups de langue à chaque note, juſques dans les doubles croches, parce que cet inſtrument n’eſt point agréable autrement. L’automate ſurpaſſe en cela tous nos joueurs de tambourin, qui ne peuvent remuer la langue avec aſſez de légèreté, pour faire une meſure entière de doubles croches, toutes articulées, ils en coulent la moitié, & ce tambourin