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BAI
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eſt chargé non ſeulement du poids de l’air atmoſphérique qui répond à la ſurface du corps, mais encore de celle de l’eau même. La ſuperficie du corps humain étant de quinze pieds quarrés, ſelon les docteurs Vainvricht & Quincy, elle eſt donc la baſe de quinze colonnes d’air d’un pied quarré & de la hauteur de l’atmoſphère, & de plus de quinze colonnes d’eau d’un pied quarré de baſe, chacune avec une hauteur égale à celle de l’immerſion ; cette dernière preſſion eſt d’autant plus grande que le fluide ambiant a plus de denſité : ainſi le bain d’eau de mer, toutes choſes égales, produit une plus forte preſſion, parce qu’elle eſt plus denſe & plus peſante que l’eau douce. La preſſion qu’on éprouve dans le bain eſt donc en raiſon compoſée de celle des quinze colonnes d’air atmoſphérique dont on a parlé, les quinze colonnes d’eau & de la denſité de ces dernières. Chacune de ces colonnes d’air est de 2 240 livres ; quinze de ces colonnes exercent donc une preſſion de 33 600 livres ſur la ſurface du corps d’un homme de moyenne taille, à laquelle preſſion il faut ajouter celle qui réſulte de la preſſion des quinze colonnes de l’eau du bain.

D’où il ſuit que les différentes ſituations dans le bain peuvent augmenter ou diminuer la force de cette preſſion, & qu’elle n’eſt jamais égale ſur toutes les parties du corps. Un homme de grande taille, par exemple, plongé debout à la hauteur de cinq pieds dans la riviere, ſupporteroit une augmentation de poids un peu moindre qu’un ſeptième de trente-deux à trente-trois pieds d’eau équivalent au poids de la colonne atmoſphérique. Aſſis dans un bain, c’eſt-à-dire, plongé d’environ deux pieds & demi, il ne ſupporteroit que l’augmentation d’environ un quatorzième.

Cette augmentation de poids dans le bain eſt aſſez conſidérable pour produire des effets ſenſibles & des révolutions importantes dans l’économie animale. Le premier effet eſt la gêne du mouvement. Il eſt toujours plus difficile dans un fluide, plus denſe, plus peſant, & qui par conſéquent réſiſte plus. Il eſt par conſéquent moins libre dans l’eau que dans l’air, & plus gêné dans l’eau marine que dans l’eau douce. Le ſecond effet eſt une ſenſation de plaisir ou de douleur que produit le choc & le frottement des molécules aqueuſes ſur la peau.

Cette force compreſſive tend à reſſerrer tous les points de la ſurface, à les rapprocher, à les condenſer. « Elle raccourcit donc les fibres, les rend plus cohérentes, par conſéquent plus élaſtiques & plus fermes, dit M. Marteau. En reſſerrant les fibres, elle diminue le calibre de tous les genres de vaiſſeaux cutanés. Elle force donc le ſang & les humeurs à refouler vers l’intérieur dans le grand torrent de la circulation. Par conſéquent dans un temps donné il revient au cœur une plus grande quantité de ſang qu’il n’en recevoit dans une meſure de temps égale avant l’immerſion. Par une ſuite néceſſaire de cette plus grande affluence de ſang aux ventricules, le cœur augmente la force de ſes mouvemens de ſiſtole ; car la réaction du cœur eſt toujours proportionnelle à l’action des fluides ſur ſes parois. Par une conſéquence néceſſaire encore, la force truſive des artères eſt augmentée dans toutes les parties où la preſſion n’exerce pas ſon pouvoir, & ſ’oppoſe par des réſiſtances invincibles ; car perſonne n’ignore que le jeu libre des artères eſt toujours proportionnel aux mouvemens du cœur ». D’où on peut inférer, non que la vîteſſe de la circulation ſoit accélérée, ce ſeroit un état de fièvre, mais qu’elle acquiert de la force & de la vigueur dans les parties ſur-tout que la charpente oſſeuſe met à l’abri de la preſſion, &c.

Un autre effet de cette preſſion, c’eſt une ſorte de difficulté de reſpirer qu’éprouvent ceux qui ſont plongés dans l’eau juſqu’aux épaules (abſtraction faite de la température du bain qui peut augmenter cet effet). La raiſon de ce phénomène c’eſt que l’air intérieur n’eſt plus en équilibre avec les fluides qui compriment l’extérieur de la poitrine. La colonne d’eau qui la preſſe est un ſurcroît de charge ajouté au poids de l’atmoſphère, &c.

C’eſt à la faveur de la preſſion que la fluidité de l’eau joue auſſi ſon rôle dans le bain. Son premier effet eſt de délayer, humecter, détremper, diſſoudre, & enſuite entraîner par une douce colliſion les craſſes & les ordures collées à la ſurface de la peau. On les voit quelquefois ſurnager l’eau des premiers bains, comme ces flocons légers qui ſurnagent le vin quand il s’aigrit dans des bouteilles à demi vides. Cette déterſion ſeroit en ſoi-même un avantage réel ; elle suffiroit pour emporter bien des cauſes des prurits incommodes, & rétablir la liberté de la tranſpiration inſenſible que gêne l’obturation des pores extérieurs. Mais la fluidité de l’eau ne borne pas ses effets à l’épiderme.

La peau étant une eſpèce de crible percé de millions de pores exhalans & inhalans, c’eſt-à-dire, de trous propres à laiſſer ſortir & entrer des torrens inviſibles. On ne ſauroit douter que les molécules les plus ſubtiles du fluide dans lequel on prend le bain, ne s’inſinuent par ces orifices dans le corps, & ne pénètrent dans les veinules lymphatiques qui les portent & les entraînent dans le torrent de la circulation. Cette pénétration eſt plus prompte dans le bain chaud que dans le bain tiède, & moins lente dans le bain tiède que dans le bain froid.

Les effets de cette abſorption ſont 1o. le ra-