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ſurfaces des corps. Il en eſt, à plus forte raiſon, de même lorſqu’on emploie des graiſſes & autres linimens. Leur inſertion augmente le frottement, & l’engrenage réciproque des parties.

Quoique, dans ces cas, le frottement dont nous venons de parler, augmentant les points du contact, augmente auſſi la ſomme des forces attractives, & que, ſous ce rapport, on puiſſe dire que l’effet d’adhérence produit par le frottement, dépende de l’attraction ; cependant il y a encore un effet qui ne dépend que de l’engrenage des parties : or, ce dernier effet eſt celui du frottement proprement dit, & qu’on ne peut évaluer.

Un morceau de glace taillé en rond, de deux pouces & demi de diamètre, & ſuſpendu par un crochet maſtiqué ſur la ſurface ſupérieure, étant mis en équilibre à l’un des bras d’une balance, ſi on fait enſuite deſcendre cette glace juſqu’à ce qu’elle touche immédiatement la ſurface du mercure que contient un vaſe placé au-deſſous, on obſervera qu’en ajoutant ſucceſſivement pluſieurs poids dans le baſſin oppoſé de la balance, juſqu’à ce qu’il en ait aſſez pour détacher la glace & vaincre l’adhéſion ; on obſervera, diſons-nous, que cette glace tiendra encore à neuf gros, & qu’elle ſera emportée par dix-huit grains de plus.

Cette force ainſi déterminée, dit M. de Morveau, je néglige les dix-huit grains ; l’appareil étant porté ſous le récipient de la machine pneumatique, je pompe l’air juſqu’à ce que la colonne ſuſpendue dans la jauge ſoit entièrement ſuſpendue ; & néanmoins la glace continue d’adhérer au mercure du vaſe, & de ſoutenir, par cette adhéſion, les neuf gros qui chargent l’autre bras de la balance. Ici on néglige les dix-huit grains.

Selon les expériences qu’a faites ce ſavant, il réſulte qu’un morceau de glace de deux pouces & demi de diamètre, adhère

au mercure, avec une force égale à 
756 grains,
à l’huile de tartre par défaillance, 
210
à l’eau, 
258
à l’huile d’olive, 
192
à l’eſprit-de-vin, 
162

un morceau de ſuif de pareil diamètre adhère

à l’eau, 
334
à l’huile de tartre, 
294
à l’huile d’olive, 
280
à l’eſprit-de-vin, 
226

Les expériences ſuivantes du même ont été faites avec des plaques rondes de différens métaux, toujours d’après les principes du docteur Taylor, & il a trouvé que

l’or adhère au mercure avec une force de, 
446 grains,
l’argent, 
429
l’étain, 
418
le plomb, 
397
le biſmuth, 
372
le zinc, 
204
le cuivre, 
142
l’antimoine, 
126
le fer, 
115
le cobalt, 
008

De ces dernières expériences, M. de Morveau a cru pouvoir en déduire que l’adhéſion des corps aux liquides eſt en raiſon de leur affinité de diſſolution.

M. Achard a fait auſſi un grand nombre d’expériences de la même eſpèce. Après avoir d’abord cherché la force d’adhéſion de l’eau au verre, à différentes températures, il a remarqué que l’adhéſion étoit en raiſon inverſe de la température. Ce ſavant a fait enſuite des expériences ſur l’adhéſion du verre de différens diamètres à pluſieurs liquides, & ſur l’adhéſion de vingt ſubſtances différentes avec vingt liquides. Tous ces réſultats, à quelques petites anomalies près, paroiſſent s’accorder aſſez bien avec la ſuppoſition de M. de Morveau, que l’adhéſion eſt en raiſon de l’affinité de diſſolution.

Les expériences des ſolides facilement ſolubles, étant abſolument néceſſaires pour vérifier l’opinion de M. de Morveau, ce ſavant les a répétées, & a trouvé que l’adhéſion de la pierre calcaire à l’eau étant 100, celle de la même pierre à l’acide ſulfurique (vitriolique) étoit 99, à l’acide nitrique 97, à l’acide acéteux 98 : mais cette adhéſion, dans les trois dernières expériences, étoit diminuée par le dégagement des bulles d’air, pendant l’action des acides ſur le marbre. Il a cherché enſuite à déterminer cette force de ſoulèvement, en chargeant ſucceſſivement le morceau de marbre, & il employa ainſi juſqu’à 45 grains, ce qui lui fit croire que la force d’adhéſion du verre à l’acide nitrique étoit de 168 grains, au lieu de 97.

M. du Tour a fait, après les expériences de M. de Morveau & de M. Achard, des expériences analogues, pour vérifier l’opinion du docteur Taylor ſur l’adhéſion. La plupart de ces expériences ont été faites par immerſion, c’eſt-à-dire, en plongeant un corps en équilibre, & déterminant la force avec laquelle il tente à s’enfoncer. M. du Tour, a déduit de ſes expériences, imprimées dans le journal de phyſique, tomes 15, 16 & 19, que la méthode indiquée par le docteur Taylor, pour déterminer l’adhérence, n’eſt appliquable que lorſque les corps ſolides ne ſont point mouillés par les liquides. Il penſe, 1o. qu’il y a inégalité dans les réſultats ; 2o. que la preſſion de l’atmoſphère y exerce une action ſenſible ; 3o. que lorſque le ſolide mouille, ce n’eſt point la cohéſion du ſolide au liquide qui eſt meſurée, mais la cohéſion dans les parties même du liquide. M. Beſile eſt de cette dernière opinion. M. de Morveau examine les raiſons d’après leſquelles M. du Tour fait ces trois objections à la méthode du docteur Taylor ; il combat, il développe & explique la cauſe des anomalies qui ſe trouvent dans ces expériences, & conclut que ces anomalies même prouvent que la loi de l’adhéſion eſt générale & conſtante, & que, juſqu’à préſent, l’examen ſcrupuleux de M. du Tour n’a fait qu’ajouter aux preuves de cette vérité, &c.