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tique, comme la racine ſixième des ſurfaces des rames, l’on peut diminuer beaucoup la ſurface des rames, ſans diminuer ſenſiblement leur effet ; ainſi, l’on peut eſpérer de pouvoir faire naviguer dans l’air l’aéroſtat avec des rames aſſez légères, pour qu’un ſeul homme puiſſe les faire agir commodément. Cet illuſtre ſavant applique enſuite ſa théorie à deux exemples ; il ſuppoſe dans ces exemples que la quantité d’action des hommes eſt égale à un poids de 20 livres, multiplié par une vîteſſe de deux pieds & demi par ſeconde, ce qui équivaut à un poids de 50 livres élevé à un pied par ſeconde, quantité que M. Daniel Bernoulli a évaluée à 60 livres, élevé à un pied par ſeconde pour un travail de huit heures par jour. M. Montgolfier ſuppoſe encore que l’aéroſtat eſt mis en mouvement par deux rameurs ; mais qu’ils n’agiſſent utilement que la moitié du temps de leur travail, en ſorte qu’ils n’emploient utilement que la moitié de leur action, réduction probablement ſuffisante pour ſuppléer aux différentes pertes d’actions inévitables dans la manœuvre des rames appliquées aux aéroſtats, & que l’on ne pourra évaluer que d’après beaucoup d’expériences ; d’après ces ſuppoſitions M. de Montgolfier trouve qu’un aéroſtat ſpécifique de 70 pieds de diamètre prendroit une vîteſſe de 998 toiſes par heure, & qu’un aéroſtat de 26 pieds de diamètre prendroit une vîteſſe de 2 434 toiſes par heure.

Pour diriger les aéroſtats, il faut commencer par leur donner une forme qui tende à conſerver la direction reçue. La forme ſphérique eſt très-avantageuſe pour les aéroſtats par la propriété de contenir, ou, ce qui eſt la même choſe, de déplacer un plus grand volume ſous une moindre ſurface. Cette conſidération eſt ici très-puiſſante, puiſque la force d’aſcenſion n’eſt jamais que l’excès de légéreté du fluide contenu ſous le poids de l’enveloppe qui le contient. Cette forme a d’ailleurs d’autres propriétés également précieuſes, en ce qu’elle préſente de tous côtés une réſiſtance égale au fluide environnant, qu’elle eſt moins ſuſceptible de compreſſion par l’action des vents, qu’elle offre plus de ſolidité pour la ſuſpenſion des machines, qu’elle ſe prête enfin plus qu’aucune autre à la réduction de ſes dimenſions ſans en être ſenſiblement altérée.

Mais on doit convenir que la forme ſphérique eſt la moins propre à la direction. Deux choſes ſont eſſentielles à cet objet, la première que le corps deſtiné à prendre & à conſerver le mouvement dans une ligne donnée, déplace dans cette ligne le moindre volume poſſible du milieu qui lui fait obſtacle, parce que, la réſiſtance ſera d’autant plus conſidérable qu’il aura à déplacer dans le même temps un plus grand nombre de ſes parties. Or, il eſt démontré que le volume du fluide déplacé eſt en raiſon de la ſurface antérieure du corps qui ſe meut, tellement que la réſiſtance d’un triangle iſocèle qui préſente ſa baſe, eſt à la réſiſtance du même triangle qui préſente ſa pointe, comme le carré de l’un des côtés eſt au carré de la moitié de la baſe. Le corps ſphérique qui, dans quelque poſition que ce ſoit, préſente toujours égalité de ſurface antérieure, éprouvera donc plus de réſiſtance que tout autre ſolide d’un pareil volume, ſuſceptible de préſenter moins de ſurface par l’un de ses côtés.

La ſeconde condition eſt que le corps qu’on ſe propoſe de diriger dans un fluide, éprouve par sa forme même plus de réſiſtance ſur les flancs ou dans la ligne perpendiculaire à ſa direction, que dans la ligne antérieure ; car il eſt évident qu’il perſéverera ; d’autant plus dans cette direction qu’il s’en écartera d’autant moins que le fluide lui oppoſera plus de force pour l’y retenir. Un globe, ainſi qu’on vient de le voir, n’eſt pas ſuſceptible d’éprouver dans un milieu quelconque plus de réſiſtance dans un ſens que dans un autre ; c’eſt donc encore ſous ce point de vue le ſolide le moins propre à la direction.

D’après ces conſidérations les commiſſaires de l’Académie de Dijon ont pensé qu’en conſervant à l’enveloppe du Gaz, qui eſt la principale partie de l’aéroſtat, la forme d’un globe, il falloit en même temps modifier cette forme ; 1o. en lui adaptant une proue ſur les principes établis par Newton & par les autres mathématiciens qui ſe ſont occupés après lui à déterminer quelle eſpèce de ſolide devoit couvrir une baſe donnée, expoſée au choc d’un fluide, pour que la réſiſtance fût la moindre poſſible ; 2o. en augmentant la ſurface des flancs de la machine, en proportion du volume du globe, & autant que le permettoit la force d’aſcenſion ſur laquelle toutes ces augmentations doivent être priſes.

Pour remplir ces deux objets on avoit couvert la partie antérieure de l’aéroſtat de Dijon d’une proue dont les deux plans formoient un angle aſſez aigu, & qui, ſe prolongeant ſur les côtés de l’aéroſtats, y produiſoient une augmentation de ſurface équivalente à 159 pieds carrés (Deſcription de l’aéroſtat de Dijon.)

Il y a des phyſiciens qui ont penſé que la forme d’aéroſtat la plus propre à la navigation aérienne étoit celle d’un cylindre dont la longueur horiſontale ſeroit cinq à ſix fois plus grande que ſa hauteur verticale, & dont la partie antérieure ſeroit terminée par un cône un peu allongé ; de cette manière il diviſera l’air avec plus de facilité, & éprouvera moins de réſiſtance de la part du vent.

Pluſieurs eſſais que j’ai faits en petit m’ont