Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T1.djvu/528

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pieds ; un de ceux qui ſe ſont trouvés dans les circonſtances les plus favorables, eſt le P. Lozeran. La deſcription curieuſe qu’il a donnée de ce météore, dans un temps où l’électricité n’étoit pas connue, annonce que de brillantes découvertes dans ce genre, ſont réſervées à l’obſervateur hardi qui le premier, ſur les aîles du globe aéroſtatique, s’élancera dans ces hautes régions où ſe forment les tempêtes. Quel plaiſir, & combien il ſera doux pour l’heureux phyſicien qui aura à ſa diſpoſition un globe convenable ! Quelle ſatisfaction d’être au ſein des orages & de la foudre, de braver ſes carreaux ſans avoir rien à redouter ! Car l’obſervateur aéroſtatique, électriſé par égalité avec le milieu environnant, c’eſt-à-dire, au même degré de l’électricité que la moyenne région où il ſe trouvera, n’aura rien à craindre de la foudre, elle ne pourra point s’élancer ſur lui. Ici l’obſervateur eſt électriſé comme la foudre ; il en fait partie, & peut être avec raiſon appelé un homme-foudre. Or, il eſt de principe, & l’expérience la plus conſtante démontre qu’un corps électriſé ne peut lancer une étincelle ſur une autre, ſi celui-ci eſt électriſé de même que le premier.

Comme pluſieurs perſonnes, peu familiariſées avec les expériences d’électricité, s’imaginent qu’un aéroſtat rempli de gaz inflammable & élevé au milieu des nuages orageux & électriques, préſenteroit des dangers, ſur-tout ſi une étincelle électrique s’y portoit, pour diſſiper ces craintes, j’ai fait les expériences ſuivantes.

Après avoir rempli un petit globe aéroſtatique de gaz inflammable, combiné avec l’air atmoſphérique dans les proportions convenables pour opérer la plus forte détonnation, je l’ai placé ſur le premier conducteur ; & quelqu’ait été le temps de la première électriſation, il n’y a point eu d’inflammation ni de détonnation : on a répété l’expérience avec des aéroſtats ſemblables, faits, 1o. en taffetas, 2o. en papier, 3o. en métal, & le réſultat a toujours été le même.

Afin de confirmer cette aſſertion par d’autres expériences, j’ai préſenté des pointes métalliques & des tiges arrondies à la ſurface de ces globes divers pour en tirer des aigrettes & des étincelles, & jamais la détonnation n’a eu lieu. Pour montrer enſuite que cet air étoit réellement inflammable, j’ai retiré ce globe de deſſus le conducteur, & par un autre procédé, j’ai opéré la détonnation. On peut répéter très-facilement cette expérience avec un piſtolet de Volta.

Pour la rendre encore plus concluante, j’ai fait traverſer dans l’intérieur d’un aéroſtat métallique, une longue tige de métal bien ſoudée aux deux inſertions, à l’entrée & à la ſortie ; l’appareil rempli de gaz inflammable combiné avec celui de l’atmoſphère, a été ſuſpendu au conducteur par ſon extrémité ſupérieure ; & ſoit qu’on l’ait électriſé à l’ordinaire, ſoit qu’on ait attaché au bout inférieur de la tige une chaîne qui traînoit sur le plancher, ou qui en étoit peu éloignée, ſoit qu’après avoir ôté la chaîne, on ait tiré des étincelles de différens points de la tige qui traverſoit le vaſe, & de ce dernier également, ſoit enfin qu’on ait déchargé une bouteille de Leyde par la tige de l’appareil, il n’y a eu aucune détonnation. Par le procédé dont nous avons parlé ci-deſſus, on a enſuite allumé le gaz inflammable contenu, en tirant une étincelle d’une petite tige de cuivre renfermée en partie dans un tuyau de verre, & inſérée dans le petit aéroſtat, à la manière des piſtolets électriques ; & pour le dire en paſſant, ces expériences prouvent également qu’il n’y a aucun danger de faire traverſer les paratonnerres dans les foſſes d’aiſance & dans les magaſins à poudre, les tiges des paratonnerres étant prolongées au-delà de ces endroits, ſans aucune ſolution de continuité, & aboutiſſant, comme on le fait ordinairement à des eaux ſtagnantes. L’expérience a complettement confirmé cette vérité, lorſque j’ai rempli non ſeulement de gaz inflammable, mais encore de poudre, les appareils qui repréſentoient ces divers bâtimens.

L’aéronaute phyſicien pourra voir, dans d’autres occaſions,. & dans leur ſéjour natal, les globes de feu qui preſque toujours portent l’épouvante dans l’ame des ſpectateurs terreſtres ; ces feux qui s’allument ſi ſouvent dans l’atmoſphère, & que le peuple nomme des étoiles errantes ; ceux qui prennent quelquefois des formes biſarres, & à qui les anciens donnèrent des noms qui le ſont encore plus. Il lui ſera permis ſur-tout d’examiner attentivement juſques dans les hautes régions, les cauſes de ce magnifique ſpectacle, dont la nature, dans ſes jours de magnificence, pare ſi ſouvent le ciel qu’elle embellit de nouveaux feux (l’aurore boréale), dont les figures variés & animées de mouvemens divers, frappent toujours d’admiration la terre étonnée.

Cet inſtrument fécond en merveilles utiles, le globe aéroſtatique, lui fournira encore les moyens de connoître mieux les cauſes des météores aqueux, de la pluie, de la neige, de la grêle, des brouillards, les reſſorts ſecrets qui les mettent en jeu, élèvent, réuniſſent, ou précipitent les vapeurs. On auroit pu ſavoir, par exemple, par le moyen des aéroſtats, qu’elle a été la hauteur du brouillard ſec de 1783. « À l’égard de l’élévation de la vapeur, dit M Sennebier, je doute qu’on en ait atteint les limites ; un ballon aéroſtatique auroit pu peut-être, en faire toiſer la hauteur ». Ce brouillard étoit plus élevé que le Jura & les Alpes.

Le phyſicien aéroſtatique tranſportant dans la moyenne région, de la glace priſe ſur la terre