Page:Engel - Traité de la nature, de la culture, et de l'utilité des pommes de terre, 1771.djvu/11

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n’auroient abſolument pas pu ſe conſerver. Je trouve donc que l’opinion de ceux qui les font venir de la Virginie, eſt la ſeule fondée & ne peut être revoquée en doute. C’eſt Walther Raleigh, qui les a apportées en Angleterre du temps de la Reine Eliſabeth ; c’eſt lui qui a découvert ce pays, il y a près de deux cents ans, & lui a donné ce nom. Le trajet eſt peu de choſe, on en tranſporte avec ſuccès des arbres, graines & plantes, on ne paſſe pas la ligne ; enfin puiſque les deux pays ſont ſitués ſous le 36 degré, pourquoi ne pas convenir que ce fruit vient d’une colonie Angloiſe & voiſine, plutôt que d’une Eſpagnole ſi éloignée & inabordable pour les Anglois ?

On convient pourtant qu’on a vu en Europe les premieres chez les Anglois, qui ſe ſont moins appliqués à cette culture que les Irlandois ; de-là on les a tranſportées en Brabant, enſuite en quelques Provinces d’Allemagne. En Suéde, depuis cinquante ans ; en Saxe, depuis trente ans ; cependant en Suéde elle ont pris très fort de l’accroiſſement par les ordonnances Royales, & en Saxe on les a ſi fort multipliées, qu’un Sgr. de condition, qui a ſervi parmi les troupes Françoiſes dans la derniere guerre, m’a aſſuré, qu’y ayant une petite armée, à laquelle l’ennemi avoit coupé les vivres, elle a vécu pendant huit ou dix jours uniquement de pommes de terre, & s’en eſt bien trouvée,

Il eſt donc ſurprenant qu’elles ayent été ſi fort cultivées en Suiſſe, dans les montagnes