Page:Erckmann-Chatrian - Histoire d’un conscrit de 1813.djvu/140

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de l’Empereur à la bataille d’Eylau. Le capitaine trouva que c’était tout simple de se battre pour un soufflet ; il dit même que cela donnerait un bel exemple aux conscrits, et que, si Zébédé ne se battait pas il serait indigne de rester au 3e bataillon du 6e.

Toute cette nuit-là, je ne pus fermer l’œil ; j’entendais mon camarade ronfler et je pensais : « Pauvre Zébédé, demain soir tu ne ronfleras plus ! » Je frissonnais d’être couché près d’un homme pareil. Enfin, je venais de m’endormir vers le petit jour, quand tout à coup je sens un air très froid ; j’ouvre les yeux, et qu’est-ce que je vois ? le vieux hussard roux, qui avait enlevé la couverture de notre lit et qui disait :

« Allons, debout, fainéant, je vais t’apprendre de quel bois je me chauffe. »

Zébédé se leva tranquillement et répondit :

« Je dormais, vétéran, je dormais. »

L’autre, en s’entendant appeler vétéran, voulut tomber sur mon camarade ; mais deux grands gaillards qui lui servaient de témoins l’arrêtèrent, et d’ailleurs tous les Phalsbourgeois étaient aussi là.

« Voyons… voyons… dépêchons ?… » criait le vieux.

Mais Zébédé s’habillait sans se presser. Au bout d’un instant, il dit :