Page:Erckmann-Chatrian - Histoire d’un conscrit de 1813.djvu/236

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Yéri, le garde forestier, disait toujours qu’un bon chien de chasse doit être maigre; sauf la différence des grades, je pense la même chose des bons généraux et des bons soldats. Nous autres nous sommes toujours à l’ordonnance, mais nos généraux engraissent, et cela vient des bons dîners qu’on leur fait à la maison. » Ainsi me parlait Zimmer dans la sincérité de son âme, et cela ne m’empêchait pas d’être triste. Dès que j’avais pu me lever, je m’étais dépêché de prévenir M. Goulden par une lettre que je me trouvais à l’hôpital de Hall, dans l’un des faubourgs de Leipzig, à cause d’une légère blessure au bras; mais qu’il ne fallait rien craindre pour moi : que je me portais de mieux en mieux. Je le priais de montrer ma lettre à Catherine et à la tante Grédel, afin de leur donner de la confiance au milieu de cette guerre terrible. Je lui disais aussi que mon plus grand bonheur serait de recevoir des nouvelles du pays et de la santé de tous ceux que j’aimais. Depuis ce moment, je n’avais plus de repos; chaque matin j’attendais une réponse, et de voir le vaguemestre distribuer des vingt et trente lettres à toute la salle, sans rien recevoir, cela me saignait le cœur : je descendais bien vite au jardin pour fondre en larmes. Il y avait un